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étaient des épicycloïdes ou des cercles… alors qu’elles n’étaient ni l’un ni l’autre…


Combien de temps d’abord reste dans l’air le singulier projectile quelle est, comme on dit, sa « durée de trajet ? » Manquant d’abord de données précises là-dessus, nous avions émis l’hypothèse que les durées de trajet croissent proportionnellement de la même façon dans le vide et dans l’atmosphère et, en tenant compte que la durée de trajet des obus qui bombardent Dunkerque à 38 kilomètres est d’à peu près 1 minute 57 secondes, nous en avions déduit, par le calcul, que le trajet du projectile qui nous intéresse doit être d’environ 3 minutes. Effectivement on a constaté, depuis, que cette durée, à très peu près, a cette valeur, ce que continue d’ailleurs un article récent du général allemand Rohne, grand spécialiste de ces questions, article paru dans la Gazette de Voss, et qui indique comme durée de trajet 3 minutes et 3 secondes. La longueur de la trajectoire, — dont la corde est d’environ 120 kilomètres, — n’étant pas inférieure à 150 kilomètres, on en déduit que la vitesse moyenne du projectile pendant son trajet est supérieure à 800 mètres à la seconde (2 880 kilomètres à l’heure). C’est beaucoup plus que la vitesse de surface de la terre dans son mouvement de rotation, et à l’équateur où elle est la plus forte, et qui ne lui fait parcourir qu’environ 83 kilomètres dans le temps que l’obus en parcourt 150. Autrement dit, si nous imaginons par la pensée que cet obus puisse transporter un être pensant, et tourner indéfiniment autour de la terre avec la même vitesse moyenne dans le sens où le lancent les Allemands, il tournerait plus vite autour d’elle que ne fait apparemment le soleil. et les jours et heures s’écouleraient à l’envers pour cet être pensant. C’est-à-dire qu’il rajeunirait au lieu de vieillir, — en apparence du moins, — et voici qui montre bien comme notre façon de subdiviser le temps est conventionnelle.

En réalité, la vitesse réelle de l’obus sur sa trajectoire varie d’une façon complexe et diffère plus ou moins de sa vitesse moyenne. Si cette trajectoire était dans le vide, l’obus aurait à son point d’arrivée la même vitesse qu’au départ, cette vitesse décroissant d’ailleurs de part et d’autre jusqu’au sommet de la trajectoire où elle serait minima. En fait, il n’en est pas tout à fait ainsi à cause de l’influence perturbatrice de l’air.