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des États-Unis, la Chine, qui, du reste, avait eu soin de consulter au préalable le Japon, allait se trouver l’alliée, non seulement du Japon avec lequel, depuis la mort de Yuan che Kai, ses relations s’étaient fort heureusement rétablies, mais des grandes Puissances de l’Ouest, de toutes celles dont l’amitié lui était le plus précieuse. Elle se libérait en même temps du joug de la Puissance dont, depuis vingt ans, elle avait eu le plus à souffrir, de cette Allemagne qui, après lui avoir arraché par violence la cession à bail du port de Kiao-tchéou, l’avait humiliée en 1900 par la mission expiatoire du prince Tch’ouen à Berlin, et qui, depuis lors, n’avait cessé, pour édifier sa propre fortune, de lui susciter des embarras sur toutes ses frontières, avec ses voisins du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest. Le ministre Wou ting fang n’eût pas demandé mieux, du jour où la rupture diplomatique des États-Unis se changeait en état de guerre avec l’Allemagne, que d’imiter cet exemple et d’abolir définitivement les derniers restes de l’emprise allemande.

Les États-Unis et le Japon l’y poussaient également. Mais, à ce moment, l’intrigue et l’or de l’Allemagne firent leur suprême tentative. Tandis que le chef du cabinet, le général Touan K’i jouei, était résolu à aller jusqu’à l’état de guerre et que les deux Chambres du Parlement chinois l’avaient voté, le président Li yuan hong hésitait, les membres du parti avancé, le Kouo-min-tang et les chefs révolutionnaires du Sud se montraient opposés. De ces dissentimens résulta une crise dans laquelle les divers partis, les généraux, les influences parlementaires et militaires voulurent encore mesurer leurs forces. Au plus fort de la bagarre, l’un des généraux de l’ancien régime, le général Tchang Hiun, crut le moment venu de restaurer l’Empire. Pendant quelques jours, l’ancien héritier de la dynastie mandchoue, le prince Pou yi, âgé de onze ans, fut tiré de sa retraite pour cette résurrection inattendue de la famille des Ta-tsing. Ni les États Unis, ni le Japon, n’avaient voulu intervenir dans cet imbroglio intérieur, persuadés que la raison et le bon sens ne tarderaient pas à triompher. Le 4 août, en effet, les troupes du général Touan k’i jouei entraient dans Pékin, le prince Pou yi, par un édit impérial, abdiquait son pouvoir éphémère, le vice-président Feng kouo chang, qui n’avait pas quitté Nankin, devenait, par la démission de Li yuan hong, président de la République, et le général Touan