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L’appel jeté par les États-Unis, le jour de sa rupture avec la chancellerie de Berlin, eut un effet, sinon immédiat, du moins profond et radical. Lorsqu’au mois d’août 1917, le Siam à son tour se décida à rompre avec l’Empire allemand, ce fut par une déclaration de guerre. Du même coup, à la date où le ministre d’Allemagne et ses agens recevaient leurs passeports, tout ce que ceux-ci avaient installé avec tant et de si persévérans efforts s’effondrait ou passait en d’autres mains. En même temps était perdue pour l’Allemagne l’une des bases d’action d’où, jusqu’à la dernière heure, elle avait machiné ses intrigues contre l’Inde anglaise, l’Indochine française, les possessions néerlandaises, les Philippines, Hong kong et tous les établissemens occidentaux en Extrême-Orient.

La Chine avait été, elle aussi, et plus encore, travaillée à fond par l’Allemagne. Elle devait, dans ses plans et projets, lui servir d’instrument et de levier, non seulement contre les Puissances de l’Ouest, mais contre le Japon. Bien que chassés de Kiao-tchéou dès le mois de novembre 1914, et bien qu’à la même date le pavillon germanique eût été éliminé des mers orientales, les Allemands n’avaient pas renoncé à leurs manœuvres : négocians, financiers, ingénieurs, journalistes, enrégimentés sous les ordres de l’amiral von Hintze, leur ministre à Pékin, répandaient dans tout le monde chinois le venin et l’or de leur propagande. Contre ces dangereuses campagnes, les États-Unis, même avant de s’être rangés à nos côtés, n’avaient pas manqué d’agir avec la Grande-Bretagne, la France, la Russie et le Japon, de façon à maintenir le statu quo de l’Asie et du régime républicain reconnu par les Puissances. Lorsqu’au mois de février 1917 la rupture avec l’Allemagne fut un fait accompli, ils eurent une action plus directe, plus décisive. La Chine fut la première, parmi les États d’Asie, à les écouter et à les suivre. Le ministre des Affaires étrangères du nouveau président, Wou ting fang, qui avait été pendant de longues années ministre à Washington, et qui avait autant d’admiration que de sympathie pour le génie et les institutions de l’Amérique, avait dès le premier jour fait savoir au gouvernement fédéral que la Chine était prête à répondre à l’appel qui lui était adressé. Le 12 mars la rupture diplomatique de la Chine avec l’Allemagne était elle-même consommée.

En suivant l’initiative américaine et en se plaçant sous l’égide