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CHRONIQUES DU TEMPS DE LA GUERRE

II [1]
LE " P. C. " DES QUATRE-CHEMINEES


Et maintenant, buvons, car l’affaire était chaude…
V. Hugo.


« Ces choses-là n’arrivent qu’à la guerre. Vous êtes combattant et, le même jour, permissionnaire. Vous faites des projets, vous parlez dans deux heures et vous voilà happé dans une bataille : vous ne savez plus si vous avez dix minutes à vivre. Vous êtes trois qui parlez ensemble pour cinq cents mètres, et il en reste deux en route : le soir, vous êtes chez vous comme si de rien n’était. C’est cela, la guerre : la surprise, le contraste, le hasard, l’imprévu. Ce sont de sacrés quarts d’heure, mais ils donnent du goût à la vie.

« Oui, continua le colonel, cette nuit des Quatre-Cheminées, je me suis toujours dit que j’en ferais un petit acte. Je mettrais pour titre : De la coupe aux lèvres ou Le Songe d’une nuit d’été. J’ai l’idée que ce serait quelque chose d’amusant… »


I

Nous dinions ce soir-là à la citadelle de Verdun, mais ce n’était pas en bas, au mess, à la gargote historique de Gartheiser (du Grand Hôtel Gartheiser, à Bar) qui se trouve au rez-de-chaussée, — un endroit magnifique, du reste, que cet antre de la victuaille,

  1. Voyez la Revue du 1er décembre 1917.