Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/373

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle a eu lieu en 1914. Et c’est précisément sur ces garanties indispensables que nous voudrions essayer de donner à nos lecteurs les indications que nous suggèrent la géographie et l’histoire.

Ces garanties sont évidemment et avant tout d’ordre militaire, et elles se résument dans ce qu’on a appelé la bonne frontière militaire.

Mais outre que les bonnes frontières militaires ne coïncident pas toujours avec les frontières, qualifiées naturelles ou politiques, la guerre actuelle a démontré, de la façon la plus meurtrière, que la valeur économique des zones frontières, c’est-à-dire leurs ressources minières et industrielles, ont une influence incalculable sur la défense d’un pays. Les considérations économiques doivent donc entrer pour une large part dans l’étude et la reconstitution d’une frontière défensive.

Nous ne sommes pas les premiers à. traiter ce problème de notre future frontière militaire, et, par voie de conséquence, de celle de l’Allemagne vaincue. Cependant nous espérons, sans dépasser nos droits de polémique, apporter une contribution supplémentaire et acceptable à l’œuvre qui se prépare, moins dans les secrets des chancelleries que dans l’opinion publique, régulatrice de plus en plus éclairée des gouvernemens.


On a souvent dit que la guerre actuelle était en germe dans le traité de Francfort, et ce n’était que trop vrai. Mais peut-être a-t-on attribué trop exclusivement au caractère politique de l’annexion de l’Alsace-Lorraine le danger qui a menacé pendant quarante-quatre ans la paix européenne et qui a fini par mettre la France et l’Allemagne de nouveau aux prises, et avec elles l’Europe et le monde. Après tout, cette guerre effroyable a commencé, au moins dans ses prétextés immédiats, par le côté tout à fait opposé. La question d’Orient parait avoir déchaîné le conflit plus que la question d’Alsace-Lorraine que la France n’avait pas soulevée, qu’elle écartait même autant que possible, avec une patience que d’aucuns estimaient faiblesse en face des vexations et des injures réitérées de l’Allemagne à propos du Maroc. Certes, la France n’oubliait pas ; elle en a témoigné par l’enthousiasme qui a emporté le pays et l’armée quand la guerre a été inévitable. C’est bien au cri : « Nous allons reprendre notre Alsace-Lorraine ! » que tout le peuple a couru