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qui avaient l’imprudence de les accueillir à bras ouverts. La Roumanie n’est pas la seule Puissance qui ferait bien de méditer le sens des paroles de M. Stourdza.

Le Roumain n’a pas le génie du commerce. Il abandonne paresseusement le négoce aux étrangers, principalement aux Juifs. C’est la revanche d’Israël. Le Congrès de Berlin avait prescrit au nouvel État, comme condition de sa reconnaissance par les grandes Puissances, d’accorder aux Juifs l’égalité politique. Le gouvernement roumain a éludé cette obligation. Le Juif continue d’être assimilé aux étrangers dans l’impossibilité où il est d’acquérir la propriété rurale, réservée par l’article 7 de la Constitution aux indigènes et aux naturalisés. Il n’exerce pas les droits du citoyen, mais il est soumis à l’impôt du sang, par-dessus les autres. Il combat pour la patrie qui refuse de le reconnaître comme un de ses enfans, même s’il est né sur son sol et s’est attaché à elle comme à une véritable mère. On répandrait inutilement beaucoup d’encre à réfuter les argumens dont se sont servis les Roumains des différens partis, d’accord entre eux pour maintenir cet ostracisme. Il n’en est pas moins vrai qu’il y a là une injustice sociale, que tous les vrais amis de la Roumanie s’attendent à lui voir réparer. La promesse en a, d’ailleurs, été faite officiellement au cours de cette guerre.


III

Les services que la Roumanie rend à l’Europe ne consistent pas seulement à collaborera sa subsistance. Si l’Etat roumain n’était pas riverain du bas Danube, s’il n’avait pas abrité dans un de ses ports, à Galatz, la commission européenne chargée de veiller à l’entretien du fleuve, qui sait si l’Autriche-Hongrie n’eût pas étendu la main sur cette artère internationale et si l’œuvre d’intérêt public, poursuivie avec succès depuis plus d’un demi-siècle, n’eût pas été compromise à son profit !

Le résultat des décisions du Congrès de Paris, décrétant la liberté de la navigation sur le Danube inférieur, et des cinquante années de travail de la commission, dont le mandat a été prolongé par les traités de Berlin et de Londres, est un bienfait d’ordre général : la voie admirable de trafic et de ravitaillement qu’est pour l’Europe ce grand fleuve a été rendue accessible aux