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vu, par les gazettes, que j’ai proposé la suppression d’un certain paragraphe de l’adresse qui a été maintenu par la majorité, quoiqu’avec de tels amendemens qu’on en a presque oblitéré le sens. Mais j’ai eu la satisfaction d’avoir le premier Ministre et le garde des Sceaux dans ma minorité, ce que j’ai trouvé assez gai pour un début. Le fait est que le parti de la Cour est irrésistible là-dedans, quoiqu’il n’ait d’influence que là et qu’il n’en ait aucune dans la Nation. J’espère que tout ceci achèvera de vous convaincre que c’est uniquement par intérêt pour vous et par suite de l’amitié bien sincère que je vous porte, que j’ai préféré que vous restiez tranquillement dans votre station actuelle, pendant que je faisais ces courses que je n’ai jamais envisagées que comme des courses momentanées. J’ai vu Madame votre mère peu de jours avant mon départ de Paris et j’ai eu avec elle une conversation à fond à votre sujet dont je crois qu’elle est restée pleinement satisfaite. Il n’y a pas de spéculation à faire sur ce malheureux pays, et God alone can know what is kept for us in the store of fortunity, etc.

« L.-PH. D’ORLEANS. »


Ces trois lettres font naître quelques réflexions.

Le Duc d’Orléans est beaucoup moins empressé que lors de la première Restauration. On se souvient de sa joie de revoir son pays, et de se laisser enlever de Palerme par un bateau anglais. Il est inquiet cette fois et probablement peiné d’avoir vu sa bonne volonté mal reconnue et ses conseils peu suivis. L’incident de la Chambre des Pairs a augmenté cette amertume.

Il ne cache pas sa satisfaction d’être en Angleterre. Il y demeurera jusqu’en 1817. Un louable sentiment l’y retient : il échappe à la politique, il se soustrait aux attaques de ses ennemis, et aussi à des empressemens compromettans. Mais n’est-il pas juste en même temps de remarquer à quel point l’esprit d’émigration avait pénétré partout, même chez ce prince qui l’avait si sévèrement jugé ?

Une quatrième lettre à M. de Chabot fait connaître les préoccupations qu’avait alors le Duc d’Orléans et fournit quelques indications sur l’état économique de la France en cette douloureuse époque :