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avaient obtenu le résultat souhaité[1]. L’éducation est complète. Quand, — en 1791, — le serment civique sera exigé, le colonel des dragons de Vendôme verra partir sans regret ses meilleurs officiers : M. de Martin, M. de Lagondie. Lui-même, se dépouillant de son cordon du Saint-Esprit, écrira à Beaujolais : « J’ai bondi de joie en ôtant la bandoulière aristocratique. »

Il garde cependant ses épaulettes de colonel, et il a dix-huit ans !


Lorsque s’ouvre la période révolutionnaire, on trouve le Duc de Chartres, à son rang de prince du sang, dans la suite du Roi. Le 5 mai 1789, il se rend dans le cortège royal, à l’ouverture des États généraux. La Reine était assise à la gauche du Roi sur un trône moins élevé, les princesses à gauche de la Reine, les princes à droite du Roi, les pairs sur l’estrade derrière le Roi et les princes : salle magnifique, séance belle et solennelle, sans incidens, mais rendue fort longue par la lecture d’un Mémoire de M. Necker. Le Duc de Chartres est rentré au château de Versailles entre les rangs des soldats et parmi les acclamations de la foule, dans la voiture du Roi. Le soir, il est parti pour Saint-Leu.

Il est encore à Saint-Leu, le 22 juin, dans le jardin de sa mère, « en habit de coutil : » arrive un ordre du Roi d’être le lendemain matin à sept heures à Versailles, en costume de pair. Il trouve le Roi tout prêt, au bas des escaliers, ses voitures attelées, attendant que les députés aient consenti à prendre séance. Il faut se rappeler que cinq jours plus tôt, le 17 juin, sur la motion de Sieyès, le Tiers État s’est déclaré Assemblée nationale, invitant le clergé et la noblesse à se joindre à lui, abrogeant les impôts existans, et les rétablissant seulement pour la durée de l’Assemblée nationale. Le Roi avait fermé la salle : les députés s’étaient rendus au Jeu de Paume et avaient prêté le fameux serment.

  1. A la Législative, il avait prononcé ces paroles : « Je ne crois pas que vos Comités entendent priver aucun parent du Roi de la faculté d’opter entre la qualité de citoyen français et l’expectative soit prochaine soit éloignée du trône… Si va » » adoptes l’article, je déclare que je déposerai sur le bureau une renonciation formelle aux droits de membre de la dynastie régnante pour m’en tenir à ceux de citoyen français. Mes enfans sont prêts à signer de leur sang qu’ils sont dans les mêmes sentimens que moi. » (Fonds Beugnot.)