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te condamne par ta propre bouche. » Ces lignes sont de 1901.

Notre Code civil a été si longtemps en vigueur qu’il n’est pas inconnu aux générations contemporaines : de très jeunes gens sont nés tandis qu’il régnait encore. Le Code pénal succomba d’abord, mais il fallut des victoires pour faire disparaître le Code civil. Un premier projet présenté après Sadowa, en 1867, échoua devant le Reichstag de la Confédération du Nord. De nouvelles propositions furent apportées en 1871-1872, et reprises en 1873. Il ne fallut pas moins de treize années d’études pour que les commissions se missent d’accord, car les travaux préparatoires commencèrent le 28 février 1874, et la première lecture n’eut lieu que le 27 décembre 1887. Le texte définitif fut adopté le 1er juillet 1896 par 222 voix contre 48, plus 18 abstentions et 92 absences, et peut-être serait-il très intéressant de savoir comment ces votes se sont répartis. Le nouveau Code civil, valable pour tout l’Empire, entra en vigueur le 1er janvier 1900, mais les derniers arrêts rendus dans le pays rhénan en vertu de la législation française datent de 1908.

Il ne semble pas que la rive gauche ait accueilli avec une joie sans mélange le cadeau qu’on lui faisait, et l’anecdote suivante montre que notre souvenir subsiste encore dans les couches profondes de la population ;


Il y a deux ans, écrivait M. Holzhausen en 1902, je suis entré aux environs de Noël dans la vieille auberge d’un bourg prospère aux environs de Bonn. Dans la pièce à côté de celle où je me trouvais, les notables du lieu, devant des verres pleins, discouraient du Grand Napoléon et de son Code, tandis qu’ils parlaient avec ironie de certaines créations juridiques récentes. Aussitôt que l’on eut remarqué ma présence, quelqu’un fit observer que la compagnie tenait là une conversation dangereuse, sur quoi l’on ferma doucement la porte. J’étais seul dans ma chambre avec mon arbre de Noël, mais j’aurais volontiers donné les légendes allemandes qu’il me chuchotait pour prendre part à cet entretien sur l’homme au manteau gris. Cet incident peut paraître un conte des anciens temps, et pourtant il s’est passé dans les derniers jours de 1899.


En effet, la grande mémoire de l’Empereur, toujours vivante dans l’Allemagne napoléonienne, l’était plus particulièrement encore sur la rive gauche du Rhin. Elle a contribué à maintenir à l’égard de la France une certaine sympathie que les prospérités de l’Empire n’ont pas encore détruite ; elle a empêché que