Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 42.djvu/620

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

promet une prime de 3 000 thalers à celui qui dénoncera le coupable, et se met en devoir de gratter l’affiche séditieuse. La nuit suivante, des mains inconnues en apposent une nouvelle, qui reproche au chancelier l’indemnité de guerre prélevée sur nous. « Avec tes cinq milliards, tu n’as pas assez d’argent pour payer celui qui a fait cela. »

Pour répondre au congrès vieux-catholique de Bonn, favorisé par le ministère berlinois, les évêques organisent le 28 juillet de grandes fêtes à Mayence. L’Univers est le seul journal parisien qui y soit représenté. Son correspondant assiste aux réunions et entend tous les discours, dont l’un, prononcé par le baron de Loë, parait avoir produit sur lui une très vive impression. Mais il ne le résume pas. « Vos lecteurs, écrit-il, me le pardonneront. Ils savent trop bien qu’il y a des choses que M. de Bismarck est forcé d’écouter en Allemagne, mais dont la presse française ne saurait parler sans commettre le crime de lèse-majesté française, en donnant un sujet de plainte aux puissans de Berlin. » Ces lignes suffisent pourtant pour que l’on devine ce que Loë a pu dire.

Les fêtes du 28 juillet ont, d’autre part, permis au haut clergé de mûrir un projet que la presse fait bientôt connaître : l’archevêque de Cologne, les évêques de Mayence et de Munster combinent un grand pèlerinage rhénan et westphalien. Les fidèles qui y prendront part sous la conduite du comte de Stol-berg iront à Paris déposer un ex-voto dans la chapelle de Notre-Dame des Victoires, et de là ils se rendront à Lourdes pour y porter leur offrande, une bannière magnifiquement brodée, représentant en grandeur naturelle saint Boniface, le patron de l’Allemagne catholique. A Berlin, le coup est très vivement ressenti, surtout étant donné qu’il succède au refus de célébrer la fête de Sedan. A Paris, où l’on se remet à peine de l’alerte de mars, l’initiative des évêques suscite une bien compréhensible anxiété. D’après l’Italienische allgemeine Correspondenz, l’ambassadeur français auprès du Vatican demandé au cardinal Antonelli d’interdire le pèlerinage, mais se heurte à une fin de non-recevoir. Sur une nouvelle intervention directe du duc Decazes auprès du Pape, celui-ci charge l’archevêque de Cologne de donner des instructions spéciales à Stolberg. Alors, les organisateurs proposent de modifier le programme : les fidèles se réuniraient d’abord à Paray-le-Monial et se