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PETITS POÈMES


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ANNIVERSAIRE

Oui. Je sais bien que c’est par une aube d’automne
Que la mort vous a pris. Mais tout mon cœur s’étonne
Au sombre souvenir de ce matin de deuil.
Pourtant je vous ai vu, et dans votre cercueil
Mêlé pieusement près de votre visage
A vos cheveux d’argent l’or pourpré des feuillages ;
Ceux-là dont vous aimiez les arbres entre tous…
Et nous avons longtemps pleuré tout près de vous.

Et cependant, jamais vous n’êtes mort, mon Père !
Vous n’avez pas cessé depuis cette heure amère
De chérir votre enfant, de la suivre en tout lieu,
Et sa bouche jamais ne vous a dit adieu.
Toujours auprès de moi votre chère présence
M’ordonne en souriant la tendre obéissance
À ce que vous aimiez : des poètes aux fleurs.
Vous êtes là, les jours de joie ou de douleur,
Ne ménageant jamais cette large lumière
Dont vous embellissiez les choses coutumières ;
Vous êtes là, lorsque lisant un livre ami
Je sens se réveiller mon esprit endormi ;
Vous êtes là le long des promenades douces.
Fumant la pipe longue ou rêvant sur la mousse,