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les amis de M. Lerroux, de M. Melquiadès Alvarez, de M. Cambo, n’ont pu se décider. La rue s’en est un peu mêlée, par des manifestations et des bagarres, au cri de «Maura, no! » Pas de Maura! M. Maura a finalement échoué, comme avaient échoué M. Sanchez de Toca et, une première fois, M. Garcia Prieto, avant que, du deuxième coup, il aboutit. Le Cabinet qu’a formé de pièces et de morceaux le marquis de Alhucemas est, lui aussi, du type des ministères de coalition. M. Cambo n’y figure pas, mais il y a délégué un de ses lieutenans, et l’on y voit jusqu’à un républicain, M. Rodes. Avec tous ces concours, il n’est peut-être pas très solide. Il a beaucoup promis, et sera sans doute fort embarrassé d’en tenir autant. Ce qu’on peut dire, c’est que la place est provisoirement occupée, et que le vide qui se creusait en Espagne est momentanément rempli. Ce qui serait trop dire, c’est que la crise est désormais conjurée : elle est bien plus vaste et bien plus profonde. Elle est dans les entrailles de la nation, au centre de toutes les institutions, même de celles qui devraient en être le plus jalousement préservées, parce qu’elles sont le suprême appui, la suprême forteresse des autres. Il y aura un jour à en analyser les causes et les effets. Mais que l’art est long et que la vie est brève! Pour nous ici, dans ce bouillonnement de l’histoire universelle, que nos douze pages sont courtes !

A la tout à fait dernière heure, nous apprenons le coup d’État maximaliste et la déposition du gouvernement provisoire de Kerensky. Lénine (Zederblum ?) est maître de Petrograd, ce qui n’est pas encore être maître de la Russie. Les gouvernemens de l’Entente ont peut-être quelque chose à faire : nous aimons à croire qu’ils y ont déjà réfléchi.


CHARLES BENOIST.

Le Directeur-Gérant : RENE DOUMIC.