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chiffres représentant les profondeurs, les courbes circonscrivant les hauts-fonds, et les lettres donnant soit la nature du fond (sable, vase, gravier, coquilles brisées, etc.), soit les noms des bancs ou écueils, objet de la constante préoccupation des marins. Des ronds jaunes pour signaler les phares, les hiéroglyphes du balisage et l’infinité des petits rochers teintés de gris, comme la terre qu’ils prolongent dangereusement, complètent le tableau.

Sachant maintenant la lire, prenons la carte de la Manche (n° 5400), dont on trouvera ici une réduction. C’est entre le cap Gris-Nez et Douvres que le Pas de Calais offre sa plus petite largeur, 18 milles (33 kilomètres). Mais, presque au milieu du détroit, s’allongent deux bancs, le Varne et le Colbart : le premier un peu plus rapproché de la rive britannique, le second plus voisin de la nôtre, avec sa queue par le travers de Boulogne. Les instructions du service hydrographique, gros livre à couverture rose qui est le « guide » du navigateur, recommandent de ne jamais s’y aventurer avec un navire de fort tirant d’eau, même aux environs de la haute mer. Un chenal étroit les sépare, dans lequel il est certain qu’une escadre ennemie hésitera toujours à s’engager, crainte que le balisage n’ait été faussé bu enlevé. Et la même raison qui nous interdisait les eaux anglaises devait, encore bien davantage, pousser les Allemands à s’en écarter. Il y avait donc toutes les raisons de prévoir qu’ils passeraient entre Gris-Nez et le Colbart, où le couloir n’a que 8 milles de large. Premier repère.

Mais comment donne-t-on dans le Pas de Calais, quand on descendre la mer du Nord ? Nulle part les lignes pointillées qui dessinent les bancs de sable sur la carte ne se montrent aussi multipliées que le long des côtes de France et d’Angleterre, à l’ouvert du détroit et parallèlement à ses rivages. Prolongeant au loin les plages du Kent, de Douvres à l’embouchure de la Tamise, ce sont les larges basses Goodwin : en face, une multitude de petites dunes sous-marines, alignées et serrées comme des rides, et dont les principales s’appellent le Dyck, les Ruytingen et le Hinder, s’étendent à une quinzaine de milles devant Dun-kerque. Entre les deux s’ouvre un canal, d’environ 11 milles de largeur, que doit suivre toute flotte faisant route sur le Pas de Calais. Mais, à peu près dans l’axe, se dresse l’épi du Sandettie, symétrique, ici en dehors, avec le Varne et le Colbart en dedans. Second repère. Et retenons ces appellations de