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la princesse. Je la vis peu ce jour-là et je la quittai de bonne heure pour faire ma toilette, dîner et me rendre à Malmaison où j’étais invitée au spectacle. C’étaient deux vaudevilles charmans, à la suite desquels il y eut un petit ballet de circonstance, où dansèrent Vestris, Duport, Mme Gardel, etc.[1] . Après le spectacle, on nous fit passer dans la galerie où l’Empereur fit sa tournée et bientôt après l’Impératrice. Elle me dit : « Comment se porte Mme Charpentier, je vais la voir, vous voudriez bien être du voyage, » etc., et nous revînmes à Paris.

« Lundi, je me rendis comme à l’ordinaire à mon poste. Mme Murat se tint quelque temps dans notre salon et, dans un moment où nous étions tête à tête, elle me dit : Le général Charpentier s’est séparé de M. Vautré[2]. Je lui répondis que toi ni lui ne nous en aviez parlé et que je savais qu’effectivement il était à Paris. Alors, elle me dit : Sûrement, il est ici, et le général, en le renvoyant, lui a dit qu’il était bien fâché de cette séparation, mais que sa femme ne pouvait pas le souffrir chez elle, et que c’était la seule raison qui les faisait se séparer. Je répondis alors à Mme Murat que cela m’étonnait beaucoup, parce que tu ne te mêlais en rien de ce qui regardait le service et, à plus forte raison, de ce qui regardait les aides de camp de ton mari. Elle insista alors fortement en me répétant que c’était absolument toi qui l’avais voulu. Je finis par lui dire que, si cela était, il était sûr aussi que tu avais eu de fortes raisons pour l’exiger. J’ai su, depuis et d’ailleurs, que M. Vautré a dit de ton mari et de toi toutes sortes de faussetés. Il parait très soutenu par le prince et la princesse. Il est fortement recommandé par eux au ministre de la Guerre.

« Le mardi, je ne la vis presque pas ; elle avait déjà quelques douleurs ; j’y passai la soirée ; le mercredi je m’y rendis à onze heures, elle était couchée ; j’y retournai le soir et j’y restai jusqu’à onze heures, je ne la vis pas. Elle accoucha à quatre heures

  1. Ballet de Gardel à l’occasion de la fête de l’Impératrice, frais de représentation 1 283 fr. 40.
  2. Le général Charpentier a pour aides de camp, en l’an XIII, Vautré, chef de bataillon, Paitru, capitaine, Halry, capitaine (État militaire). Ce Vautré doit être Victor Vautré, chevalier de l’Empire en 1810, marié vers 1811, à Françoise-Antoinette-Benjamine Giovio, qui fut major en 1808, colonel du 9e de ligne en 1810 et retraité maréchal de camp honoraire en 1817, avec un titre de baron.