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détails de nos occupations journalières. Nous vivons très retirés. Le soir, quelques aides de camp restent et on joue à des jeux innocens. On se couche entre onze heures et minait. Ce soir, à huit heures, j’accompagne Mme la Maréchale aux Invalides où il se chante un Te Deum pour la fête de l’Empereur et nous revenons coucher ici. Demain, Mme Germond doit venir essayer l’habillement de cour de la princesse. Il est convenu que, quand il sera confectionné, Mme Dupont en fera un semblable sur une poupée qui te sera envoyée. Mme Murat est persuadée que cela t’amusera beaucoup. Au reste, pour ces dames, il sera plus riche que joli.

« …Le temps continue à être détestable. Il me rend malade, il m’agace les nerfs. J’attends Saint-Cyr qui vient dîner avec nous. Nous avons des toilettes à faire. C’est pourquoi ma lettre ne sera pas longue. »

Qu’elle trouve pesant l’assujettissement auquel elle est contrainte, on s’en aperçoit au premier jour. « Nous ne cessons d’être arrosés, écrit-elle le 30 thermidor (18 août). On ne trouve pas dans la journée une demi-heure pour sortir et tu dois juger de la contrariété que j’en éprouve. Cela m’apprend qu’il faut se faire à tout et je suis vraiment étonnée de ma souplesse. Mme Murat, comme tu le sais sans doute, est très sédentaire, et n’aime pas à voir du monde, de sorte qu’excepté quelques personnes dans l’intimité, elle ne reçoit pas. Cependant, elle s’est décidée à prendre un jour, et c’est les lundis. Ainsi, après-demain au soir, ce sera la grande représentation. Je ne sais pas encore si je m’y trouverai, car mon service ne commencera que le dix-huit brumaire.

« Nous sommes allées, jeudi soir, au Te Deum. C’était fort beau, la musique très bonne, mais la cérémonie véritablement ennuyeuse par sa longueur. Nous étions dans la tribune des princesses, de sorte qu’étant derrière elles nous perdions le coup d’œil. Nos soirées se passent en lecture et en conversation. Dans la journée, c’est-à-dire après le déjeuner, je reste avec Mme Murat une couple d’heures suivant les affaires qu’elle a à régler. Alors je me retire dans mon appartement où je lis et écris et où souvent je m’ennuie, parce que je suis bien circonscrite dans mon cercle et que je n’ai pas les mêmes ressources que chez moi. A quatre heures, je fais un bout de toilette et à cinq je me rends à mon poste. Je suis on ne peut plus satisfaite