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des termes qui révélaient une intimité particulière. Ce fut Barras qui, moins d’un mois après, lui annonça sa nomination au ministère de la Guerre : « Arrive vite ici, lui écrivit-il, nous faisons de la bonne besoigne parce que nous aimons tous avec chaleur la République. Je t’embrasse et je t’attends. »

S’il n’eût fallu que des phrases pour terrasser la coalition et rétablir les armées, le nouveau ministre de la Guerre y eût excellé. Il lança une proclamation où il exaltait le républicanisme des officiers généraux ; une autre où il recommandait « l’ordre et l’économie dans toutes les branches de l’administration de cette vaste république ; » une autre où il faisait un redondant appel aux vertus citoyennes : « que la tiédeur s’enflamme, s’écriait-il, que l’égoïsme disparaisse, que l’amour de la liberté domine ! » Cela était à merveille, mais son ministère manquait de partout. « Aujourd’hui, écrivait-il, le 14 frimaire (5 décembre), j’ai voulu connaître, d’après la promesse du ministre des Finances, ce que je pourrais avoir en numéraire de la Trésorerie nationale. Il devait m’être donné cinq millions 500 000 livres ; cependant, ils n’ont pu me promettre que 600 000 livres pour demain. Mais comment me les donneront-ils ? ils n’ont pas pu encore envoyer les 300 000 livres qui étaient si urgemment nécessaires pour Luxembourg. » Les embarras étaient immenses, mais Dubayet s’occupait d’abord à célébrer, dans une feuille que subventionnait le ministère, le Courrier de Paris, les actes de son administration. « Lui-même envoyait aux rédacteurs de quelques feuilles périodiques le plan des articles qu’il désirait faire insérer. » « Toujours empressé, dit un de ses biographes, de démentir les bruits fâcheux qui pouvaient affliger les républicains et relever le courage abattu de tous les ennemis de la Patrie, il offrait, le 26 brumaire an IV (17 novembre 1795), aux deux Conseils, le tableau de la situation imposante de nos armées. » Il faut entendre, pour la contre-partie, les proclamations des généraux, entre autres de Bonaparte. De même, il annonçait le 7 frimaire (28 novembre) que « le général Pichegru, si cher à nos soldats et à la République, était toujours à la tête de son armée et que ce favori de la victoire n’avait point été destitué ni mérité de l’être. « Cela n’était pas bien sûr et il y avait imprudence à se porter garant d’un homme déjà justement suspect. Chargé uniquement de la partie administrative, endossant les responsabilités sans