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tout de ce qui pouvait être utile à l’Eglise. Mais la conduite de Ketteler lui-même se chargera plus tard de démentir ces déclarations. Certes, le clergé allemand a montré parfois quelque défiance à notre égard, à cause de notre alliance avec l’Italie, ennemie du Saint-Siège. On avait vu quelques années auparavant un prêtre westphalien, Janssen, privat-docent à l’Université de Bonn, dénoncer violemment nos vues sur le Rhin. Mais Sadowa, dans l’opinion catholique, fut ressenti comme un véritable désastre. Auguste Reichensperger, de Coblence, ne trouva que ces mots en apprenant la nouvelle : « On a bien de la peine à s’accommoder de pareils décrets de Dieu. »

Or, les tendances clairement exprimées par la Prusse, dès son entrée en campagne, et bien plus après sa victoire, ont vile fait de lui aliéner les catholiques. Au moment où la guerre allait éclater, la Gazette générale de l’Allemagne du Nord avait représenté le conflit imminent comme une guerre de religion dirigée contre les adversaires de l’Eglise évangélique. Après la défaite de l’Autriche, qui est en même temps celle de la France, comme s’acharnent à le démontrer les publicistes protestans, il est bien évident que la Prusse s’érige en soldat du luthéranisme. Le langage des journaux bismarckiens inquiète les catholiques. Des personnalités comme Bluntschli, Baumgarten, Holtzendorff reprennent le rêve d’une Eglise nationale et parlent d’abolir les concessions établies par la constitution de 1850 : « Le thème de la supériorité des protestans sur les catholiques, écrit Kiessling, soit dans des livres ou des conférences, soit dans des sermons ou des articles, a été traité usque ad nauseam, entre 1866 et 1870. » Les années qui s’écoulent entre les deux guerres sont donc remplies par une lutte sourde des deux confessions. Dans la vallée du Rhin, l’exaspération est à son comble, et les journaux ennemis de Bismarck mènent une violente campagne en faveur du Pape, poursuivant sous cette forme détournée la guerre qu’ils ont déclarée à la bureaucratie berlinoise. Entre la Prusse et nous, quels que soient les reproches qu’ils puissent adresser à la politique de Napoléon III, les catholiques les plus décidés ont fait leur choix.

Dans les États du Sud, de très forts partis espèrent encore que notre intervention anéantira bientôt les effets de Sadowa. Bade est à peu près complètement inféodé à Berlin ; mais en