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faisaient avant 1914 en Alsace-Lorraine. Les villes se développent, on y perce des rues nouvelles, on y construit des monumens d’utilité publique. Le réseau des routes s’accroît et de nouveaux ponts sont jetés sur les fleuves. La navigation du Rhin devient de plus en plus intense : alors qu’en 1838 le mouvement des marchandises n’était que de 12 870 656 quintaux métriques, il atteint en 1860 le chiffre de 102 091 432 quintaux transportés en 91 135 voyages. L’on crée aussi un service de vapeurs sur la Moselle, de Metz à Coblence. De grandes lignes de chemins de fer sillonnent la province, courent le long des fleuves, mettent le pays en relations avec la Westphalie et Berlin, avec la Hollande, la Belgique et la France.

L’essor industriel et commercial, aussitôt qu’il a commencé, ne se ralentit plus. Sans doute on constate une période de misère et de renchérissement de la vie qui s’étend de 1853 à 1857. Le cercle de Trêves n’y échappe pas plus que les autres, et pourtant, rien que dans la ville, le nombre des tanneries s’augmente de huit entre 1849 et 1858. Les statistiques prouvent que, dans les années qui ont suivi la Révolution, de nombreuses usines se sont ouvertes et que de nouveaux commerces ont pris naissance. C’est vers 1860 que l’on commence la fabrication des vins mousseux. La province exploite des carrières ; elle possède des filatures, des verreries et des forges ; elle produit des tissus, du papier, des armes, des articles en fer-blanc, de la fonte et de l’acier, des matières chimiques, des cordes, beaucoup de cuir apprêté, du chocolat, bien d’autres marchandises encore. Or, sur plus de soixante-dix maisons rhénanes qui participent à notre exposition de 1867, il y en a au moins quarante qui ont été fondées après la Révolution. Toutes ensemble, elles occupent plus de 50 000 ouvriers dont 9 500 appartiennent à l’usine Krupp.

Il est bien évident que toute cette prospérité industrielle attire à la monarchie quelques dévouemens. D’autre part, une conquête qui remonte déjà à des dizaines d’années emporte avec elle, du fait qu’elle dure, des adhésions toujours plus nombreuses. Les faveurs dont un gouvernement dispose, les profits dont il est la source, les places qu’il est maître de distribuer, tout cela provoque des capitulations. Il y eut donc des conversions et il était fatal qu’il en fût ainsi. S’il fallait donner un exemple de ces ralliemens, je choisirais volontiers celui du poète Simrock.