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UN ÉTÉ Á SALONIQUE
AVRIL-SEPTEMBRE 1916
IV.[1]


Juin 1916.

L’été !…

Il est venu, en dépit du calendrier, avec les derniers jours de mai, splendide et torride. Le printemps dure si peu, dans ce pays ! Quelques orages, des matins délicieux, des soirées tièdes, une floraison folle de toutes les roses, le temps de goûter une douceur qui, tout de suite, s’achève dans l’universel embrasement, et c’est fini, le printemps n’est plus : l’été règne. Des brasiers blancs croulent du ciel décoloré ; l’atmosphère devient quelque chose de sensible qu’on croit soulever quand on respire, qui pèse sur les yeux éblouis, sur les tempes serrées, sur toute la chair moite. Les choses n’ont plus la même figure ; le vent n’a plus le même goût. La pensée souffre et se fait plus lente. L’obligation du travail régulier torture les gens qui n’ont pas réussi à s’acclimater ou qui prétendent vivre comme en France. Chaque jour on en voit, des plus courageux, qui cèdent, vaincus par l’insomnie épuisante, par l’anémie aux mille formes, par les insidieuses maladies propres à cette contrée exécrable. La dysenterie, le paludisme commencent à sévir. Le service de santé n’a pas attendu ce moment pour déclarer

  1. Voyez la Revue des 15 janvier, 1er avril et 1er juin.