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montrèrent assez dociles, ne voulurent point céder à l’intimidation. Ils n’accordèrent pas aux fiancées catholiques l’absolution qu’elles leur demandaient, ou bien ils refusèrent de publier et de bénir les mariages mixtes si les futurs époux ne leur donnaient pas au préalable des promesses suffisantes sur la religion dans laquelle seraient élevés les enfans avenir. Beaucoup d’unions projetées se rompirent devant ces difficultés. Le gouvernement, blessé et hors de lui, cita des prêtres devant les tribunaux criminels ; mais ils furent acquittés parce que leur délit ne tombait pas sous les articles du Code, et cela accrut encore l’irritation de la monarchie contre la législation napoléonienne. On tenta d’agir par le moyen des évêques, mais ils discutèrent si subtilement que l’affaire menaçait de ne jamais devoir finir. On se tourna alors vers le Pape, à qui l’on dépêcha Bunsen, ministre au Vatican. Grégoire XVI, de bonne composition, voulut se montrer conciliant : le bref Literis altero abhine anno abandonnait toute censure ecclésiastique contre les catholiques qui faisaient élever leurs enfans dans la confession protestante : ils ne seraient plus exclus des sacremens. En même temps les prêtres étaient invités à donner une assistance purement passive aux mariages mixtes contractés sans présenter les garanties nécessaires, lorsque les futurs époux persisteraient dans leur résolution.

Le gouvernement se considéra comme battu, mais ne voulut pas accepter sa défaite. Il aurait désiré la cérémonie, sans réserve du clergé. De plus, l’avertissement aux fiancés sur les dangers que couraient les enfans élevés dans la religion du père lui déplaisait. Il s’adressa de nouveau aux évêques : ne seraient-ils pas disposés à adoucir cet avertissement aux fiancés avant l’assistance passive, et à célébrer le mariage sans promesse formelle d’éducation catholique des enfans ? Leur réponse ne donna pas toute satisfaction, mais on espéra qu’avec le temps et sous une pression habile, ils capituleraient. Puis, tout à coup, l’archevêque von Spiegel fut mandé à Berlin pour conférer avec Bunsen. Le ministère, implacablement, poursuivait donc l’affaire avec une rare ténacité, et mettait tous les moyens en œuvre. Spiegel, lassé par cette obstination, signa avec Bunsen la convention du 19 juin 1834 : il renonçait à la promesse d’éducation catholique des enfans et admettait que l’assistance passive serait réduite à des cas très peu nombreux. Les autres