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système puissant de canaux, à mettre la main sur les richesses de l’Extrême-Orient. On doit espérer que le traité de paix arrachera à l’Allemagne ces privilèges et qu’il imposera par des stipulations précises, sur les tarifs de chemin de fer en particulier, la liberté de la route à notre ennemie qui réclamait la liberté des mers.

Le Londres-Bagdad prendra la place du Hambourg-Bagdad qui était une ligne d’accaparement au profit des puissances du Centre et mettra l’Orient à portée des besoins de l’Occident. « Toute la partie occidentale, surpeuplée, de l’Europe souffre d’un déficit chronique de matières premières et de produits alimentaires. Toute la partie orientale produit des matières premières et des alimens en excès[1]. » Le Londres-Bagdad aura pour premier rôle de les réunir ; et puis, par ses antennes avancées, cette route n’est-elle pas la ligne tout indiquée, presque nécessaire, au moment où la Grande-Bretagne resserre les liens avec ses colonies, puisque, d’après M. Charles Woods[2], elle permettra d’aller de Londres à Bombay en neuf jours au lieu de quatorze par Gibraltar et Suez, avant la guerre ?

Et, en même temps, de Londres partiront tous les grands express internationaux : Londres-Nord-Express ; Londres-Constantinople-Express ; Londres-Bagdad-Express ; Londres-Rome et Brindisi-Express ; Londres-Méditerranée-Express ; Londres-Sud-Express.

Mais surtout seront réunies entre elles l’Angleterre, la France et l’Italie, les trois nations sœurs de l’Europe occidentale, comme les appelait, dans un étincelant discours, M. Mackinder, l’éminent député et professeur d’Oxford, parlant au nom de la Grande-Bretagne à la réunion du Parlement interallié, — le Parlementino, — à la Sorbonne, le 6 mai dernier.

Proximi Gallis et similes sunt, « les peuples celtiques de l’Angleterre sont pareils à ceux de notre pays, » écrivait déjà dans l’antiquité Tacite retraçant la vie d’Agricola, gouverneur de la Grande-Bretagne. Et, en remontant au cours lointain des âges, les géologues, comme M. Stanislas Meunier, nous disent que le tunnel sous la Manche, en réunissant par terre ferme la France à l’Angleterre, ne fera que rétablir les dispositions

  1. M. Paul Claudel, déjà cité.
  2. Conférence de M. Woods à la Société Royale de Géographie, le 19 février 1917.