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Kérensky a reçu cette lettre vibrante qui montre mieux que toutes les paroles la valeur de son effort :


Citoyen-Ministre !

De grâce, n’allez pas annuler le miracle que vous effectuez actuellement. Ne quittez pas le front où, en ce moment, vous êtes tout, et où on a besoin de vous jusqu’à la douleur, jusqu’au cauchemar.

Vous l’avez avoué vous-même, vous n’êtes point militaire : laissez donc à vos valeureux adjoints le côté spécial de votre travail militaire, tout en le guidant de loin, ce qui, venant du front même, sera encore plus précieux.

Votre rôle à vous est tout indiqué : c’est d’allumer de vos ardentes paroles le cœur et le courage des hommes. Toute la Russie a les yeux braqués sur vous.

Restez dans l’armée, et le miracle, que nous implorons, que nous rêvons tous, deviendra réalité : la Russie aura la Victoire et la Paix.

UN OFFICIER DU FRONT.


De partout arrivent des appels à l’offensive. Il semble qu’un sang nouveau commence à circuler dans les veines du peuple russe. Nos cœurs battent d’un grand espoir. Des meetings, des congrès s’ouvrent presque chaque jour et de toutes ces tribunes montent des accens patriotiques qui doivent réjouir le ministre de la Guerre et le payer de ses peines et de ses fatigues. Il se livre à une navette incessante entre le front et la capitale. On le voudrait partout et à la fois. Je ne sais comment il y résiste. Il semble doué d’ubiquité et son amour pour la patrie, son entier dévouement à la Révolution lui confèrent une force, une résistance physique que l’on n’osait pas attendre de lui. Il est, en ce moment, la pierre d’angle de la nation russe, celle sur laquelle reposent ses destinées futures.


LES MARINS DE LA MER NOIRE

Connaissez-vous Tchernomore ? C’est un petit karlik (nain) à barbe de fleuve, des contes populaires russes. Il est fort audacieux et aime à prendre les belles femmes le jour de leurs noces.