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porter l’Évangile aux nations qui le connaissent déjà, mais ne savent point s’en servir pour leur salut, et à celles qui n’ont pas encore entendu le message de l’Éternel Amour ! » Et voici enfin un passage où l’apôtre de « l’Éternel Amour » se place résolument au point de vue religieux pour apprécier l’une des formes les plus récentes du généreux combat de son peuple pour « la cause de Jésus dans l’humanité : »


Lorsque l’un de nos sous-marins, durant l’espace de quelques minutes, envoie au fond de l’Océan trois vaisseaux anglais, sans avoir lui-même à souffrir le moindre dommage, cette action héroïque, sans parallèle dans toute l’histoire navale, est pour notre peuple chrétien un témoignage de son Seigneur d’en-haut, qui lui dit ainsi de la façon la plus manifeste : « Je suis avec toi ! Ne le vois-tu pas ? »


Telles sont donc les Dévotions de Guerre du « licencié-docteur » Johann Rump ; et je serais également tenté de ranger au nombre des pasteurs « politiciens » le conseiller de consistoire Dietrich Vorwerk, qui s’est diverti à mettre en vers une version nouvelle du Pater, et le « licencié-docteur » Preuss, d’Erlangen, qui a publié dans la plus grave des revues de théologie allemandes, et avec l’entière approbation « d’hommes éminens dans le monde ecclésiastique, » une longue étude où il comparait de proche en proche à la Passion du Christ la situation de l’Allemagne depuis le mois d’août 1914. Le Pater du conseiller Vorwerk se termine ainsi : « Daigne nous pardonner chacune de nos balles et chacun de nos coups qui manquent leur but ! Ne nous induis pas dans la tentation de laisser s’atténuer notre juste colère ! Et délivre-nous de ces ennemis qui sont, ici-bas, les serviteurs du Malin de l’enfer ! » Et ceci me fait songer à la manière dont un autre de ces théologiens allemands, le surintendant général J. Lahnsen, dans un sermon imprimé et propagé ensuite à plus de 50 000 exemplaires, explique à ses compatriotes la vraie signification du « pardon » recommandé par le Christ à la fois dans son Pater et dans tout l’Évangile. « Assurément, dit-il, l’Allemand est tenu de pardonner à ses ennemis : mais il est tenu aussi de punir le péché sous toutes ses formes ; de telle sorte que, tout en employant les moyens de destruction les plus terribles contre nos ennemis, regardés comme les exécuteurs des plus affreux péchés, il convient que le soldat allemand soucieux de perfection chrétienne se promette de pardonner à ces mêmes ennemis lorsqu’ils auront reconnu leurs péchés et s’en seront repentis ! »