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l’alliance de la géométrie et de l’analyse est utile et féconde, que cette alliance est peut-être une condition de succès pour l’une et pour l’autre. » À ce point de vue, Darboux fut un des plus brillans continuateurs de Monge. En France, et aussi en dehors de notre pays, cette école d’analystes géomètres, pour qui les problèmes de géométrie infinitésimale sont l’occasion de belles recherches, où les méthodes analytiques et les points de vue géométriques se prêtent un mutuel appui, avait hier encore Darboux pour chef ; elle réalise pleinement dans ses travaux l’alliance souhaitée par Monge.

Darboux a exposé dans ses Leçons sur la théorie générale des surfaces et sur les surfaces orthogonales ses recherches personnelles et aussi celles de ses devanciers, en leur donnant une forme nouvelle et originale. Que de beaux chapitres on trouve dans ces volumes, sur l’applicabilité des surfaces, sur le problème de la représentation sphérique, sur les surfaces à courbure constante, sur les systèmes triples orthogonaux ! Le problème célèbre des lignes géodésiques, c’est-à-dire des lignes correspondant sur une surface à la plus courte distance d’un point à un autre, a fait aussi l’objet de profondes recherches de Darboux, qui l’ont conduit à l’étude de diverses questions de mécanique se rattachant au principe de la moindre action. Ces ouvrages considérables, qui font honneur à la science française, sont rapidement devenus classiques.


L’activité de Darboux ne s’est pas bornée aux belles productions mathématiques, dont nous avons essayé de donner une idée. Il aimait l’action autant que la pensée. En 1889, il avait été nommé doyen de la Faculté des Sciences ; il se montra, dans ces délicates fonctions, administrateur éminent, et son nom restera attaché aux importantes transformations qui donnèrent alors une vie nouvelle à nos universités. En 1900, il succédait à Joseph Bertrand, comme secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences. Au poste d’honneur où le plaçait la confiance de ses confrères, Darboux acquit rapidement une grande autorité. Il eut le souci constant de maintenir ou d’accroître l’infiuence et le prestige de l’Académie. Ceux qui l’ont vu de près dans les commissions de l’Institut savent avec quel soin il étudiail les affaires et avec quelle clarté il les exposait. M. Lacroix a dit