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au cardinal et à Madame des lettres en termes presque identiques : le prince Félix (Baciocchi), à la personne duquel il est resté attaché depuis la mort de la princesse Elisa, vient, dit-il, d’apprendre par M. de Possé, le gendre de Lucien, que l’Empereur a témoigné le désir de l’avoir auprès de lui. « L’attachement et la confiance dont m’honore Son Altesse, ajoute-t-il, eussent été sans doute un obstacle pour tout autre motif de déplacement, mais, quand il s’agit de l’Empereur, aucun sacrifice ne coûte au prince et il me verra avec plaisir remplir la tâche honorable que je m’étais imposée il y a cinq ans. Il me reste maintenant à prier Votre Eminence d’être mon guide et mon appui dans cette circonstance. » Planat entre à ce propos dans des détails sur ses démêlés avec le roi Jérôme dont il redoute « le ressentiment implacable » pour n’avoir pas voulu, étant à son service, être le témoin de sa ruine après l’avoir été de ses prodigalités. »

Fesch ne saisit même pas ce prétexte pour écarter Planat : il lui oppose un refus tranchant, conçu en ces termes tendancieux : « M. de Possé n’étant point ici, écrit-il le 23 septembre, je n’ai pu connaître par quelle voie il a appris que l’Empereur témoignait le désir de vous avoir auprès de lui ; mais c’est sans doute un malentendu, puisque, toutes les fois qu’on a demandé quelques personnes à Sainte-Hélène, c’est à moi qu’on s’est adressé. C’est peut-être quelque intrigant qui veut se rendre intéressant et qui écrit d’Angleterre, donnant ses propres idées pour celles de l’Empereur ou peut-être est-il intéressé à cela. Au surplus, nous pensons qu’il n’y a pas lieu d’envoyer d’autres personnes à Sainte-Hélène. »

Fesch ment sciemment. La lettre de Mme de Montholon du 31 août prouve que la princesse Borghèse était prévenue, qu’elle avait avisé sa mère et son oncle et qu’elle avait essuyé un refus dont elle avait cherché à pallier les termes ; mais Planat ne se contente point avec la lettre qu’il a reçue de Son Eminence. Il répond qu’une lettre de Mme de Montholon qu’il vient de recevoir ne s’accorde point avec celle que lui écrit Son Eminence et quoique avec un très grand respect il pose la question sur son véritable terrain. « Si je m’en rapportais à Mme de Montholon, écrit-il, je ne pourrais m’empêcher d’être affligé et presque blessé du mystère qu’on m’a fait de cette démarche. J’osais croire que mon attachement et mon dévouement pour