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à l’assaillant plus qu’au défenseur que reviendra le bénéfice des engins de ce genre. Comment douter que les coups, portés sur des buts étendus et fixes, ne soient plus assurés que ceux qui s’adresseront à des objectifs mobiles et d’une superficie relativement faible ? Je parlais tout à l’heure du réglage du tir et, là encore, l’avantage reste à l’attaque. Comment les avions de la défense pourraient-ils donner des indications utiles alors qu’un réglage méthodique est impossible sur des buts toujours en mouvement et que « tout premier coup doit être un coup au but, » ce qui n’est pas facile à réaliser[1] ?

Remarquons encore, — et ceci est intéressant, surtout s’il s’agit de l’attaque d’un littoral s’étendant, d’une manière générale, en ligne droite, — que le nombre de bâtimens mis en jeu pour battre un ouvrage pris isolément peut être considérable, d’où résulte pour le commandant de cet ouvrage l’impossibilité pratique d’appliquer exactement à tel ou tel navire les indications fournies par un observateur aérien.


Il ne peut être question de développer ici l’exposé des méthodes d’attaque des ouvragés à terre par les bâtimens, même de la méthode dite « par égrénement, » à laquelle je viens de faire allusion. Ce serait l’affaire d’un traité en bonne forme sur la guerre de côtes. Ne disons rien non plus de la manière de grouper les unités assaillantes, suivant le rôle tactique qu’elles ont à remplir dans le bombardement méthodique ; des routes à faire suivre à celles qui doivent, tirant de plein fouet, rester en mouvement, et de la position relativement abritée qu’il convient d’attribuer aux radeaux armés, les bombardes, destinés à rester mouillés ou, au moins, à marcher à très petite vitesse. Ne mentionnons que pour mémoire l’intérêt capital des reconnaissances préalables, faites sur la place et sur les ouvrages, soit avec des bâtimens, soit, — et mieux encore, — avec des appareils aériens, non seulement par les officiers de tir de chaque unité, mais, autant que cela peut être possible, par les pointeurs de grosses pièces auxquels on fera voir exactement les buts qu’ils auront à battre, etc., etc.

  1. Si l’on m’oppose que les cuirassés qui ont attaqué les batteries turques des Dardanelles ont reçu bon nombre de coups, je réponds que l’on se battait à très faible distance, justement à cause de la disposition des lieux, ce qui donnait tout avantage au défenseur. Dans le Nord, il n’en serait plus du tout de même.