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Rambervillers et le col de la Chipotte. En même temps que par ce col, les colonnes allemandes devaient déboucher de Baccarat par les bois de Glonville et de la Moncelle et sortir de Saint-Dié par Nompatelize et Jeanménil. Triple mouvement, qui visait le même but. Sur ces trois routes, les chasseurs alpins ont dit à l’ennemi : « Halte-là ! »

De cette tâche presque surhumaine la plus grosse part sans doute retomba sur le 51e bataillon, chargé de défendre la ville et les environs de Saint-Dié, en des conditions malheureusement capables de décourager les plus braves. En pareil cas, l’énergie individuelle est la ressource suprême des gens d’honneur. A la gloire du 51e bataillon de chasseurs appartient l’héroïque mémoire du capitaine Rousse-Lacordaire qui, dans la matinée du 27 août, ayant organisé habilement les positions de sa compagnie, réussit, avec l’appui d’une batterie d’artillerie, à tenir en échec les Allemands, qui accouraient innombrables, de toutes parts, à l’attaque de la ville de Saint-Dié, défendue par une poignée d’hommes.

Emerveillé par le spectacle de la vaillance avec laquelle ces braves luttaient contre l’écrasante supériorité du nombre et de l’armement, le commandant de la batterie d’artillerie s’écria :

— Courage, mes enfans, nous faisons du beau travail !

Devant cette attitude résolue d’un bataillon qui voyait le feu pour la première fois, les Allemands, aguerris cependant par vingt jours de campagne, font un mouvement de recul si évident que les artilleurs de la batterie, canonnant le terrain à découvert, dans la direction du village de Nayemont-les-Fosses et de la ferme de la Malgrange, sont obligés d’allonger leur tir.

Alors les alpins s’élancent au pas de charge, baïonnette au canon, le capitaine Rousse-Lacordaire courant à la tête de ses hommes, sabre en main. La fusillade est vive. Les balles sifflent de tous côtés. Tous les bois d’alentour semblent vomir des casques à pointe. Que faire, un contre dix, contre vingt, contre trente, contre cent ? La batterie d’artillerie étant obligée de se replier pour n’être point prise par l’ennemi, les alpins sont criblés de projectiles de gros calibre. Peu s’en faut que la batterie ne tombe aux mains des Allemands. Sur toutes les hauteurs qui dominent Saint-Dié, d’Ormont, des Raids de