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soulevés en Allemagne. A la forte pression de Berlin, exigeant officiellement la vente des graisses, le gouvernement néerlandais n’a pourtant pas cédé. Sa résistance se justifiait par les nécessités intérieures, pour les huiles par exemple qui avaient doublé. Pour les produits de son propre sol, la Hollande demeure libre ; à condition de ne pas trop se démunir, elle exporte une partie de ses denrées agricoles à des conditions avantageuses : les fromages ont haussé de 33 à 70 florins les 50 kilos ; les œufs, de 4 à 7 florins le cent. Le même produit, sur le marché hollandais, vaut plus ou moins cher, selon qu’il est accompagné ou non d’un permis d’exportation : avec permis, le beurre se vend 4 fr. 70 ; sans permis, 3 fr. 20 ; chiffre d’ailleurs double de ce qu’il valait en 1914. On conçoit que les envois de bétail, de laitages ou de légumes se soient multipliés dans la proportion de 40, 60 ou même 100 pour 100.

Cet excès de sortie de ses productions, pompées par l’Allemagne, crée une hausse dont la Hollande profite ; elle en subit une autre sur les articles introduits du dehors : sur le sucre qui a doublé, sur l’alcool de grain qui a triplé. Si le renchérissement de la vie n’est estimé en moyenne qu’à 32 pour 100 dans les Pays-Bas, c’est que d’autres prix ont peu varié. C’est même parce que celui de l’étain, par exemple, était demeuré bas que le ministre des Colonies a vendu, dit-on, 800 000 kilos d’étain de Bornéo à l’Allemagne, afin d’obtenir des couleurs d’aniline dont l’industrie des Indes néerlandaises avait besoin.

D’Allemagne aussi ont été exportés cet été nombre de pneus de bicyclettes en Hollande, où leur apparition a causé quelque surprise. Ils étaient tirés, croit-on, des magasins français saisis dans le Nord de la France, et le gouvernement allemand les laissait sortir pour ne pas perdre complètement le marché hollandais. « Chose qui parait incroyable et qui pourtant est vraie, disait en 1916 l’Algemeen Handelsblad d’Amsterdam, l’Allemagne exporte aux Pays-Bas des articles en soie et coton et des parties de machines dont le cuivre forme la partie essentielle. »

Il est peu probable que ces ventes aient été de quelque importance ; mais il est certain que le libre-échange néerlandais profitait depuis longtemps à l’Allemagne : c’est ainsi qu’avant la guerre on construisait aux Pays-Bas les chalands rhénans en tête allemande, moins cher que dans le pays producteur des