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les Russes avaient eu le dessein de tâter les points faibles, et de lancer l’attaque à fond sur les endroits qui auraient fléchi. Il se peut que les Russes aient simplement voulu empêcher les roquades, les transports de troupes le long de la ligne.

La bataille fut naturellement précédée d’une préparation d’artillerie. L’offensive de mars avait averti les Allemands des progrès de l’armement russe, et de l’emploi que nos alliés savaient faire de leurs nouveaux canons. Le 3 avril, le correspondant de la Gazette de Francfort achevait ainsi le récit des combats du lac Narotch : « Les Russes, dans la mise en œuvre du feu roulant préparatoire, et dans le feu de barrage en avant des lignes contre les retours offensifs des Allemands, se sont instruits. » Cette préparation ne paraît pas d’ailleurs avoir atteint l’intensité qu’on a vue dans les grandes batailles du front occidental. Elle avarié, suivant Repington, entre douze heures et trente heures. Mais il ne faut pas oublier que les Autrichiens tâtaient pour la première fois des canons lourds employés en masse, et des plaisirs du tir de barrage.

Les premiers communiqués russes se contentent de dénombrer les prisonniers, dont le nombre s’accroit rapidement ; dès le 6 juin, on en signale 25 000, avec 480 officiers ; le 7, le nombre est porté à 40 000 et 900 officiers ; le 8, il y faut ajouter 11 000 soldats et 58 officiers. En même temps, arrive la première nouvelle précise. L’armée Katedine, bousculant l’armée de l’archiduc de ses positions d’Olyka, l’a rompue, et elle est entrée le 7 juin dans Lutzk.

La position d’Olyka a été décrite par M. Stanley Washburn, témoin oculaire, dans le Times du 18 juillet. Le village est logé dans un creux, à 10 kilomètres à l’Ouest de la chaussée de Lutzk à Rovno. Les forêts qui couvrent l’Est cessent à cette chaussée, de telle sorte que la région de l’Ouest, la région d’Olyka, est nue et ondulée. Forêt derrière soi, bonne condition d’offensive. Du haut des collines, on voit une grande étendue de pays, et les tranchées courant sur les versans. Les lignes autrichiennes et les lignes russes étaient par endroits très rapprochées ; mais la position russe était de beaucoup la meilleure : en effet, dans leur retraite, dans l’automne de 1915, nos alliés s’étaient arrêtés et établis sur une position préparée, tandis que les Autrichiens avaient dû se mouler sur eux. La position russe avait donc été choisie de façon à