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massacrer les soldats le 1er décembre, ne doivent faire perdre de vue à personne que ses sentimens et ceux des germanophiles qui l’entourent n’ont pas changé ; la rancune de ces derniers n’a fait qu’augmenter après que leur soumission imposée leur eut interdit de donner libre cours à leurs vrais sentimens. On ne sera jamais trop sur ses gardes à Athènes.

Il reste, d’ailleurs, beaucoup à faire encore pour y rétablir une situation normale. Les libéraux ont été élargis, mais il reste aussi à punir les coupables. Abstraction faite de la responsabilité royale et gouvernementale qui est engagée à fond dans les événemens de décembre, la responsabilité de plusieurs autres personnalités politiques et militaires, dont nos lecteurs connaissent maintenant les noms, y est également impliquée.

La question de la libération des vénizélistes ne doit pas, d’autre part, être considérée comme tout à fait résolue. La procédure qui a été suivie par les autorités royales, obligées à contre-cœur d’élargir leurs victimes, fut illégale et n’offre aucune garantie quant à la liberté et sécurité définitives des citoyens libérés. Les procureurs du Roi ont en effet refusé de signer l’ordre de libération qui ne porte que les signatures du préfet et du commandant de la place. Par cette manœuvre, la justice royale s’est réservé, le droit d’écrouer de nouveau dans les prisons les vénizélistes libérés, à la première occasion.

Une autre mesure s’impose également : nous voulons parler de la restitution des biens des vénizélistes qui furent confisqués par l’Etat sous le prétexte que leurs propriétaires étaient coupables de « haute trahison » et de « complot contre la vie du souverain. » Les journaux vénizélistes d’Athènes et de la Vieille-Grèce en général devront enfin être autorisés à recommencer leur publication, après avoir reçu les indemnités qui leur sont dues par suite de la destruction de leurs machines typographiques.

Ces mesures une fois prises et loyalement exécutées, on pourra dire que les événemens de décembre dernier n’appartiendront désormais qu’au domaine de l’histoire. Et celle-ci n’aura, — alors, — qu’à ratifier par son verdict le réquisitoire accablant que la conscience contemporaine a, d’ores et déjà, prononcé contre les criminels d’Athènes.


LEON MACCAS.