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du mois de novembre). Les agens de la bande Gounaris-Mercouris accouraient ensuite à la recherche d’une patrouille à laquelle ils dénonçaient qu’ils avaient été, eux, paisibles citoyens ( ! ! ), attaqués à coups de feu par les vénizélistes habitant dans les maisons contre lesquelles ils avaient tiré. Sur-le-champ, les patrouilles, uniquement composées de militaires, pénétraient de force dans les maisons indiquées et déchargeaient leurs fusils et leurs revolvers contre les malheureux habitans. De vrais combats furent ainsi engagés dans Athènes, dans les journées des 2, 3 et 4 décembre. Au cours de ces combats, plus de 200 citoyens, hommes, femmes et enfans furent tués ou blessés par les soldats du Roi.

Délits commis contre la liberté personnelle des citoyens. — Le nombre des personnes arrêtées rien qu’à Athènes pendant le mois de décembre, notamment pendant la première semaine, peut être évalué à 1 550. Toute personne arrêtée était conduite, sans qu’aucun mandat d’arrêt lui fût présenté, sans qu’aucune accusation fût officiellement formulée contre elle et sans qu’aucune instruction préalable fût ouverte, dans les prisons militaires où elle était internée, bien que la loi martiale n’eût pas été promulguée. Le sous-sol de la « Kommandantur, » de même que ceux de l’École des Ponts et chaussées, de la Chambre des députés et des casernes de l’infanterie et de l’artillerie furent remplis de victimes de toute classe, de tout âge et de toute profession. Parmi les personnes inquiétées de la sorte se trouvaient de nombreux citoyens libéraux connus pour leur activité politique. Mais à côté d’eux il y avait beaucoup d’autres citoyens dont le seul tort était de professer des opinions politiques libérales ou d’avoir protesté contre les cruautés dont ils avaient été les témoins, mais qui n’avaient jamais pris part à aucune manifestation politique.

La condition sociale et la notoriété personnelle des vénizélistes dont l’arrestation avait été décidée ne déterminaient, en leur faveur, aucun ménagement et aucun égard. Tout ce que le monde des fonctionnaires, des hommes de science, de la presse, du commerce, etc., d’Athènes, compte de plus distingué et de plus honorable, subit le sort affreux que les royalistes lui avaient réservé. Sans parler du maire d’Athènes, M. Benakis, dont l’arrestation fut doublement arbitraire, puisqu’elle entraînait sa destitution illégale des hautes fonctions qu’il exerçait en vertu