Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 37.djvu/907

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’hôpital de l’Institut est administré par M. Frédéric Masson, de l’Académie française. Cet homme de bien, qui, dans le domaine de la charité active et de l’assistance mutuelle, fut toujours, selon l’expression très juste d’un de ses plus ingénieux confrères, un guide incomparable, « œil clairvoyant, intelligence documentée, cœur chaud, quelque rudesse et une grande bonté[1], » a quitté, depuis plus de deux ans, ses travaux personnels, renoncé à ses occupations coutumières, négligé volontairement ses intérêts particuliers, pour se consacrer, corps et âme, au service des blessés. Chaque jour, il est à son poste, s’acquittant avec une admirable conscience des infinies obligations d’une charge dont il assuma d’abord les obligations à titre privé et dont il est devenu le titulaire, secondé à souhait par la collaboration amicale de l’architecte Louis Bernier. Au cours de la première année, 380 blessés, — presque tous de grands blessés, — ont été accueillis à l’hôpital de l’Institut et confiés aux soins d’un personnel dont le dévouement a reçu de l’administrateur lui-même, bon juge en la matière, ce témoignage précieux : « L’infirmière-major, Mme Miret, avait fait ses preuves par deux campagnes au Maroc ; elle avait les qualités morales nécessaires pour mener une formation de cette nature : l’activité, la décision, l’autorité, une égalité d’humeur et une présence d’esprit remarquables, en même temps qu’elle remplissait toutes les conditions techniques qui font l’infirmière de premier rang. Mlle Guillier, qui la secondait comme infirmière-major, avait autant de connaissances, de savoir et de dévouement… Mme Miret et Mlle Guillier ont pris la garde en septembre 1914. Depuis lors, jusqu’à cette fin de décembre 1915, sauf un mois de congé qu’on les força à prendre, elles n’ont pas manqué un jour ni une nuit d’être à la disposition des blessés ; éveillées à la moindre alerte par l’infirmière de garde, arrêtant les hémorragies, consolant les mourans, accueillant, déshabillant, couchant les blessés qu’on amenait le plus souvent par convois successifs, entre minuit et quatre heures du matin ; leur prodiguant les premiers soins, portant leurs effets au magasin d’attente, elles se trouvaient prêtes cependant à la première heure pour la visite du docteur. L’énergie et la résistance qu’elles ont déployées, et qu’elle

  1. Maurice Dennay, Rapport sur les prix de vertu, 17 décembre 1914.