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étaient venus en grand nombre à l’appel, n’arrivaient plus assez vite, le gouvernement libéral de la libérale Angleterre n’hésita pas à faire voter par le Parlement une mesure grave, l’établissement d’une pénalité frappant les porteurs récalcitrans, sous forme d’une income tax supplémentaire de 10 pour 100 sur le revenu des valeurs américaines qui, incluses dans une longue liste de 800 titres, n’auraient pas été apportées dans un certain délai pour vente ou prêt à la Trésorerie. C’était, pour les porteurs, la carte forcée : mais ne s’agissait-il pas du crédit de l’Angleterre ? La mesure eut un effet immédiat : la mobilisation des valeurs américaines est aujourd’hui achevée ou presque.

Seconde étape : la mobilisation des valeurs des autres pays neutres possédées par les Anglais. Le chancelier de l’Échiquier y procéda en août dernier, en invitant les porteurs de ces valeurs à prêter leurs titres pour cinq ans à la Trésorerie, laquelle leur alloue une bonification d’intérêt égale à 1/2 pour 100 du capital, et se réserve le droit d’acheter les titres, en cas de besoin, moyennant certains avantages assurés aux prêteurs. Aucune pénalité ne frappe ici, jusqu’à présent, les porteurs qui se refuseraient à l’opération. On calcule que le capital nominal disponible des 114 valeurs neutres dont le prêt est demandé n’atteindrait pas moins de 660 millions sterling (16 milliards et demi de francs). De ces valeurs, le gouvernement anglais se sert au fur et à mesure des possibilités pour gager des emprunts à l’étranger ; on sait qu’il a pu conclure à New-York, contre dépôt de valeurs en garantie, un emprunt de 50 millions de livres en août, à 5 pour 100, pour une durée de 2 ans, puis en octobre un emprunt de 60 millions de livres à 5 1/2 pour 5 ans : voilà des résultats tangibles de la mobilisation du portefeuille étranger du Royaume-Uni.

C’est ainsi que le gouvernement britannique s’est procuré, et continue de se procurer, les moyens de paiement qui lui sont nécessaires au dehors, et surtout en Amérique ; c’est ainsi qu’il couvre le déficit de la bal an-ce économique, et la preuve de l’efficacité de ces mesures énergiques se trouve dans le fait que le change anglais à New-York n’a guère varié depuis plus d’un an autour de 4 dollars 75, chiffre bien voisin du pair. Ce n’est pas qu’on ait pu se dispenser de faire des envois d’or à l’étranger. Depuis le début de la guerre jusqu’à la fin de septembre 1916, on estime que l’Angleterre a vu sortir de chez