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12 et du 13 décembre. Précaution utile, nos armées devant prendre le lendemain l’offensive sur tout le front, sauf le 20e corps et le groupement Hély d’Oissel, qui se contenteraient « d’aider l’offensive par une défensive active, » destinée à retenir devant eux les forces de l’ennemi. En conséquence, l’amiral prescrivit pour la journée du 14 : 1o aux unités de première ligne d’exercer une surveillance très sévère et d’envoyer des patrouilles jusqu’aux tranchées allemandes ; 2o aux 2e et 3e compagnies du 1er régiment de se porter avant le jour à la réserve du secteur où se trouvaient déjà les 1re et 4e compagnies du 1er régiment ; 3o aux deux bataillons restant au cantonnement de se tenir prêts à toute éventualité ; 4o à l’artillerie de canonner fréquemment les tranchées ennemies, les routes et les points particuliers en arrière de ces tranchées.

Ces divers ordres furent exécutés à la lettre, mais on n’en put vérifier les effets ce jour-là (14 décembre), car l’ouverture du feu, à sept heures du matin, ne fut suivie d’aucune attaque. L’offensive des autres groupes de la 8e armée, déclenchée à la même heure, ne semblait pas faire grand progrès et, de notre côté, l’ouverture du feu n’avait eu pour résultat que de réveiller l’activité du feu ennemi. Nous n’en fûmes pas trop incommodés, semble-t-il. L’amiral, à la fin de la journée, fit relever les unités du front : les bataillons Bertrand et de Kerros prirent la place des bataillons Mauros et Geynet ; le colonel Delage remplaça au commandement de la défense le colonel Paillet. Mais les instructions de l’amiral en ce qui concernait la surveillance du front ennemi ne changèrent pas et se firent même plus pressantes : nous devions multiplier les patrouilles et les reconnaissances nocturnes. L’élément de tranchée que nous occupions de l’autre côté du canal nous rendait la chose relativement facile ; nous étions là aux premières loges pour observer l’ennemi : « On est noctambule tout comme des fêtards, écrivait le 9 décembre le commandant Geynet. On dort le jour et on veille la nuit. » Le commandant ne tarit pas sur le courage déployé par les hommes qui tiennent cette pointe avancée de notre ligne, « les gars de la tête du pont, » comme il les appelle. La tranchée est « à moins de 100 mètres[1] » des Allemands ; « la nuit, l’enseigne, avec une patrouille, circule en rampant au milieu

  1. 150 mètres, dira plus exactement le lieutenant de vaisseau Feillet.