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LE
VOL DE LA MARSEILLAISE[1]


Or le Souffle voulait s’incarner dans un chant.
L’œuvre cherchait à vivre, et flottait, en cherchant.
Pour vivre, il lui fallait le Tumulte et le Rêve,
La Révolution et le printemps, la sève
Et le sang, l’arbre en fleur et la France en péril,
La Déclaration de Guerre au mois d’avril,
Et la frontière en dix-sept cent quatre-vingt-douze.
Elle flotta sur Thann, et flotta sur Mulhouse.
Il fallait un miracle, et que tout s’accordât :
Une nuit étoilée, une âme de soldat…
En passant sur Strasbourg, elle désira naître.)

Un chant de violon montait d’une fenêtre.

Dans sa chambre, en jouant, un jeune homme marchait.
Triste, il laissait parfois retomber son archet,
Comme un Ange attendant le souffle d’un Archange,

  1. Copyright by Edmond Rostand, 1917.