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Quelque victoire que la science remporte sur la mort, de quelque succès que soit couronnée une lutte vigoureuse contre des manœuvres et propagandes infâmes, le résultat obtenu, tout important qu’il soit, sera insuffisant. Si des moyens plus directs ne pouvaient être trouvés, nous ne serions pas loin d’être vaincus.

L’homme trouve naturellement dans sa conscience et dans son cœur le désir de fonder une famille et de l’accroître. C’est de là qu’il faut partir, et les moyens cherchés doivent d’abord être des adjuvans à ce désir. Il appartient en premier lieu aux groupemens, dont l’objet est d’ordre moral, de faire revivre le culte trop oublié des vertus familiales qui sont en général la meilleure garantie du bonheur. Les éducateurs de tout ordre, les publicistes, les ministres des divers cultes doivent multiplier les efforts pour restaurer dans les consciences le respect des préceptes moraux et rappeler le devoir de la transmission de la vie. Je sais bien qu’il est de règle de ne pas parler de certains sujets délicats, mais des éducateurs consciens de la gravité de leur mission sauront réaliser des changemens qui s’imposent impérieusement.

Il faut aussi qu’une atmosphère se forme, favorable aux vertus familiales. On doit reconnaître que la littérature et le théâtre se sont peu souciés de les glorifier, et nous ne savons que trop le tort que certaines de nos publications nous font à l’étranger. Il ne rentre ni dans mon objet ni dans ma compétence, de tracer le tableau de la littérature de demain ; souhaitons seulement qu’elle ne crée pas une atmosphère défavorable à la famille.

Les lois, de leur côté, n’ont guère été plus efficaces. Depuis un siècle, le législateur s’est rarement préoccupé de l’action des lois sur le développement de la famille. Souvent même, les lois faites dans les meilleures intentions ont poussé par des incidences imprévues à la restriction de la natalité, et les institutions sociales ont collaboré avec les égoïsmes individuels. Comme l’écrivait jadis Renan, notre code de lois paraît avoir été fait pour un citoyen qui naîtrait enfant trouvé, et qui mourrait célibataire.

Non seulement la famille nombreuse n’est pas honorée comme il conviendrait, mais l’opinion n’a que trop de tendance à la regarder avec pitié ou avec mauvaise humeur.