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de France au prince Eugène. Il a pensé à tout et à tous.

On sait la fin : la suspension d’armes signée le 17 entre Eugène et le maréchal de Bellegarde, la mise en marche des Français ; les proclamations aux troupes italiennes, la confiance qu’Eugène semble avoir prise que l’armée, l’Italie officielle et les souverains coalisés le veulent pour roi d’Italie ou du moins de Lombardie ; les intrigues, les trahisons, les massacres de Milan ; l’espèce d’abdication d’Eugène, sa convention nouvelle avec les Autrichiens, son départ de Mantoue où, quelques jours auparavant, Auguste est accouchée de son cinquième enfant[1] ; son rapide séjour à Vérone, son voyage à Munich, sa lettre à Louis XVIII, son arrivée à Malmaison. C’est le 9 mai. Tout dépend pour Eugène de l’empereur de Russie avec qui, depuis le 20 avril, il s’est mis en correspondance et qui a fort galamment reçu ses ouvertures. Alexandre est dans d’intimes relations avec Hortense pour le duché de laquelle il bataille, avec Joséphine dont il veut assurer la situation ; il est plein des meilleures intentions pour Eugène ; mais, « vu les prétentions de chacun, dit celui-ci, je ne puis comprendre comment on arrivera à s’entendre. » Le 23 mai, à la suite d’imprudences que la coquetterie justifiait peut-être, mais que la raison eût déconseillées, Joséphine prend un refroidissement qui, greffé sur son « catarrhe humoral, » aggravé par de nouvelles imprudences, tourne à la bronchite infectieuse. Le 29, elle expire dans les bras de son fils et de sa fille. Ainsi ne survit-elle pas à sa gloire et sa chute prend des airs d’apothéose.


FREDERIC MASSON.

  1. Theodelinde-Louise-Eugénie-Auguste-Napoleone née à Mantoue le 13 avril 1814, mariée le 8 février 1841 au comte de Wurtemberg, duc d’Urach, morte à Stuttgart le 1er avril 1857.