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ce que je dois faire pendant son absence et dans quel lieu il veut que j’habite. Je pense comme toi que je ne dois pas rester aussi près de Paris, s’il vient à s’en éloigner. Maintenant que je n’ai plus l’espérance de te voir, je compte lui écrire pour lui demander ses conseils. J’espère qu’il sera assez bon pour me diriger et qu’il a toujours conservé pour moi de l’amitié. Dans la dernière lettre qu’il m’a écrite il y a quinze jours[1], il m’a assurée que ses sentimens pour moi n’étaient pas changés et je sais qu’il approuve ma conduite. Je suis restée étrangère à tout, je n’écoute aucun propos et je ne vois ici que des personnes attachées à la Maison. Je ne désire connaître ses intentions que pour m’y conformer entièrement. J’irai avec joie à Milan, un peu avant les couches de ta femme, la soigner pendant ton absence Embrasse pour moi tes enfans, dis à Auguste que je suis touchée de la lettre qu’elle m’a écrite. Je vois qu’elle est bien affligée de ton prochain départ, et moi aussi, mon cher Eugène ; je suis bien triste de te voir faire la guerre, mais j’espère que Dieu protégera un bon fils en faveur d’une bonne et tendre mère. Je ne finirai pas cette lettre sans te parler du général Pactod qui se charge de te la remettre. Il m’a inspiré de l’intérêt par l’attachement qu’il a pour toi et par son désir d’être employé sous tes ordres. Tu seras bien aimable de t’occuper de lui. Adieu, mon cher fils, tu sais avec quelle tendresse je t’aime et t’embrasse.

« JOSEPHINE.

« On dit que l’Impératrice va à Dresde, chez le roi de Saxe et que là elle se réunira à son père. »


A Malmaison, ce 1er juillet (1812).

« Je t’ai mandé dans une de mes dernières lettres, mon Eugène, que j’avais écrit à l’Empereur pour lui demander de nouveau son consentement à mon voyage d’Italie. L’Empereur m’a répondu en date du 20 juin et sa lettre m’a rendue aussi heureuse pour toi que pour moi, car tu m’as dit souvent que tu préférais son approbation a tous les biens du monde ; tu dois être satisfait. L’Empereur me dit dans sa lettre : « Eugène, se porte bien et se conduit bien[2]. » Je compte partir pour Milan,

  1. Non retrouvée.
  2. Gubin, 20 juin 1212. « Je reçois ta lettre du 10 juin. Je ne vois pas d’inconvénient à ce que tu ailles à Milan près de la Vice-Reine. Tu feras bien d’aller incognito. Tu auras bien chaud. Ma santé est fort bonne. Eugène se porte et se conduit bien. Ne doute jamais de mon intérêt et de mon amitié. »