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peut-être de bonne foi, que certaines combinaisons de son intendant lui permettraient de payer ses dettes. Le Trésor de la Couronne avait dû avancer plusieurs centaines de mille francs et l’Empereur était fort fâché, au moment même où Joséphine se croyait assurée d’être entièrement libérée.


A Malmaison, ce 11 octobre (1811).

« J’ai reçu ta lettre, mon cher Eugène, elle m’a été d’autant plus agréable que j’étais peinée de ton silence. Je t’ai écrit il y a quelques jours. Tu auras vu par les détails où je suis entrée les motifs qui m’ont empêchée d’aller te voir. Sois sûr que j’ai beaucoup souffert de cette privation ; mais je commence à en retirer le fruit, car, au moyen des soins que j’ai pris, toutes mes dettes seront acquittées à la fin de ce mois et je m’en trouve heureuse, moins encore par le motif de ma propre tranquillité que par l’espérance de faire ce qui peut être agréable à l’Empereur. J’aurais pu rendre la charge moins lourde en l’étendant sur l’année prochaine, mais les intentions de l’Empereur n’auraient pas été aussi bien remplies, et l’idée qu’il sera content de moi me donne du courage pour supporter les sacrifices. Ma santé est assez bonne dans ce moment. Je vis ici comme à Navarre. J’ai eu le plaisir de terminer il y a peu de temps le mariage que je t’avais annoncé du comte de Pourtalès et de Mlle de Castellane[1]. La noce s’est faite à Malmaison et sans bruit. Adieu, mon cher Eugène, je n’ai pas besoin de te dire combien tu m’es cher ; embrasse pour moi Auguste et mes petits-enfans. »

« JOSEPHINE. »


Deux années n’ont point passé depuis la dernière liquidation, le dernier paiement des dettes de Joséphine par l’Empereur. Depuis le divorce où tout fut soldé, elle a, outre la dépense de ses trois millions annuels, engagé 1 200 000 francs de dettes

  1. Il en coûte à l’Impératrice cent mille francs et un trousseau. Le 11 novembre 1811, mariage mixte célébré à Malmaison par le pasteur Marron et le cardinal Maury. M. Jules-Henri-Charles-Frédéric Pourtalès, venu en France comme aide de camp Neuchâtelois du prince de Neuchâtel, Berthier, était passé ensuite dans la maison de Joséphine pour des raisons intimes, il fut admis à la cour de Prusse et fut grand maître des cérémonies. Mlle de Castellane-Norante avait été, sans titre, recueillie par l’Impératrice.