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vivement affectée ; je suis plus tranquille aujourd’hui et j’espère, d’après ce que tu me mandes, qu’il n’y a réellement aucun danger. Autrement j’irais de suite auprès d’elle. La saison ne m’arrêterait pas. Ecris-moi, mon cher Eugène ; j’ai besoin de tes lettres et je les attends avec impatience. Adieu, mon cher fils, je t’embrasse et ta famille.

« JOSEPHINE. »


A Navarre, ce 20 janvier 1811.

« Je vois avec peine, mon cher Eugène, que la convalescence d’Auguste marche lentement ; je sais qu’il n’y a aucun danger, et c’est ce qui me rassure, mais je suis bien affectée de la voir souffrir si longtemps. Afin de me distraire de cette idée, je me suis occupée d’une petite parure pour elle et j’espère qu’elle pourra bientôt s’en servir. Je la lui envoie par M. de [Caprara] que je charge aussi de te porter le sabre que je te destinais depuis longtemps[1]. Ces petits soins embellissent ma solitude. Je t’ai déjà parlé de la vie de Navarre ; elle est toujours la même et je m’y accoutume. C’est un bien si doux que la tranquillité ! L’ambition est la seule chose qui puisse en dégoûter et, Dieu merci, je ne suis pas atteinte de cette maladie. Je voudrais seulement être plus à même de te voir. Peu de choses alors me manqueraient. Hortense est ici depuis quelques jours ; elle retourne demain à Paris. Elle est si maigre et si changée que j’ai presque autant de peine que de plaisir à la voir. Je voudrais bien lui donner ma santé qui est très bonne dans ce moment. La gelée a repris depuis hier, ce qui augmentera les promenades et diminuera les lectures du salon. Adieu, mon cher fils, je t’embrasse tendrement et ta petite famille.

« JOSEPHINE. »


Navarre, le 1er février (1811).

« J’ai été pendant plusieurs jours très inquiète, mon cher Eugène, de ne pas recevoir de bulletin de la santé d’Auguste, mais celui du 23 m’a rassurée. Je vois que la fièvre et les douleurs l’ont quittée, et j’espère qu’elle sera bientôt rétablie. Je voudrais avoir la même espérance pour Hortense, mais elle est

  1. Ce sabre appartient au duc Georges de Leuchtenberg, « sabre de fantaisie avec ceinturon, boucles en or et camées antiques » (n° 7 de la collection).