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françaises, marins russes ou anglais des détachemens de Belgrade, prisonniers autrichiens, recrues serbes, un peuple entier marche vers Kraliévo.

Le Gouvernement est toujours à Nich d’où il supplie les Alliés de le secourir : Uskub est maintenant aux mains des Bulgares qui, d’autre part, attaquent Kniajewats ; une prompte arrivée de troupes anglo-françaises pourrait seule améliorer la situation. Plusieurs fois par jour, M. Pachitch s’adresse de Nich aux représentans alliés ; il implore l’envoi immédiat de 120 à 150 000 hommes : « Si d’ici dix jours, leur fait-il dire, ce secours arrive, la Serbie pourra être sauvée ; s’il n’arrive pas ou s’il arrive trop tard, la Serbie sera écrasée, et les Alliés auront alors besoin d’expédier bien plus de troupes dans les Balkans. » Aux appels désespérés de M. Pachitch, le ministre adjoint des Affaires étrangères joint ses prières ; télégraphiant en clair, il imaginait une sorte de langage de convention. Le 30 octobre dans la matinée, le ministre de France reçoit de lui la communication suivante : « Celle que vous avez soutenue pendant quatorze mois, gravement malade ; secours prompt peut améliorer situation. Télégraphiez d’urgence amis Paris. » Quelques heures plus tard, un nouveau télégramme arrivait : « Prière répéter Paris envoi secours pour notre malade qui ne va pas bien. » Et le lendemain 24 octobre, au moment où les Allemands travaillaient fiévreusement à établir leur jonction avec les Bulgares, le ministre télégraphiait : « Notre malade température 40°, dites, je vous prie Des Grag (c’était le ministre d’Angleterre) hâter médicamens anglais. » Il adressait dans la soirée un nouvel appel : « État toujours même gravité ; malade réclame secours Paris Londres. Non arrivée question chaque heure. »

Le 25, il n’envoyait que ces seuls mots : « Espérons et attendons. » M. Pachitch allait en effet exposer lui-même aux quatre représentans alliés les dangers de la situation. Il s’était rendu le 26 octobre à Vrntzé pour y assister aux obsèques du compagnon de toute sa vie, du ministre des Finances Lazare Patchou. Vrntzé n’étant qu’à peu d’heures de Kraliévo, il avait pu venir s’entretenir quelques instans avec les ministres d’Angleterre, de France, d’Italie et de Russie : « Tout, leur déclara-t-il, dépendait de l’arrivée des Alliés ; s’ils parvenaient à dégager Uskub à temps, la situation serait transformée. Mais s’il fallait renoncer à l’espoir de voir Uskub dégagé et les