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au taux normal de 5 shillings ou 25 pour 100. Les contribuables ayant droit, de par leur chiffre de revenu, à un taux de taxation inférieur, doivent réclamer restitution du trop-perçu en faisant la déclaration de leur revenu global. En 1913, sur 1 100 000 contribuables, il y a eu de ce chef 907 506 réclamations reconnues valables ; avec la progressivité partout substituée à l’unité de taux, le nombre va s’en accroître encore, et les restitutions pour trop-perçus atteindront des chiffres énormes. Voici un petit revenu de 131 livres, qui légalement doit 1 livre 13 shillings d’impôt ; il se verra retenir « à la source » 32 livres 15 shillings, et pour rentrer dans la différence que de démarches, de tracas et de temps perdu I Comment sortira-t-on de l’impasse ? Ministres et commissions[1] ont toujours déclaré que la retenue « à la source » est la pièce maîtresse de l’appareil, d’où dépend toute sa productivité, et qu’il faut la maintenir intacte à tout prix. Mais entre la retenue « à la source, » qui suppose unité de tarification, et la progressivité nouvellement introduite, on s’aperçoit qu’il y a opposition : les deux pièces du mécanisme, la vieille pièce maîtresse, et le nouveau jeu d’engrenages, se grippent et se coincent. Des mécomptes sont à prévoir dans la marche et le rendement ; de l’avis des experts une révision s’impose. On a voulu forcer la vitesse de la machine, il est à craindre qu’on ne force la machine elle-même en quelques-uns de ses organes essentiels.

Jusqu’à ces derniers temps du moins, la productivité de l’income tax s’est montrée extraordinaire : 69 millions sterling pour l’exercice 1914-15, 128 pour 1915-16. Au budget de 1916-17 l’income tax figure pourprés de 195 millions sterling (4 875 millions de francs), sous réserve de mécomptes probables[2]. Rappelons qu’en 1912 et 1913 elle ne rapportait qu’à peine 45 millions sterling, et 32 seulement en 1906-07, il y a dix ans ! — Inconcevables, vertigineux : tels apparaissent, à nos yeux français, ces chiffres de rendement. Et l’on conçoit qu’ils puissent troubler le jugement de certains esprits peu avertis qui rêvent déjà des flots d’or qu’un pareil Pactole roulerait pour le

  1. Voyez le rapport du sélect committee chargé de l’enquête sur le régime de l’income tax en 1906 (notamment le paragraphe 5).
  2. Pendant les trois premiers mois de l’exercice 1916-17 (avril à juin), les recouvremens effectués au titre de l’income tax sont restés fort au-dessous des prévisions : ils n’ont atteint que 20 203 000 livres sterling.