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fonctions d’officier d’ordonnance lui auraient pris un temps nécessaire à ses exercices militaires. Je te prie de lui rendre moins sensible ce sujet de chagrin, en lui accordant ton amitié. L’Empereur me charge de te le recommander de nouveau et de te dire de l’admettre à la table. D’ailleurs, j’ai pour lui un attachement particulier. Il est fils d’un oncle qui m’a servi de père. Je suis sûre d’avance qu’il répondra aux soins que tu auras pour lui et qu’il nous fera honneur. Embrasse pour moi Auguste et dis-lui que je lui demande ses bontés pour mon cousin. Adieu, mon cher fils, je l’embrasse avec toute la tendresse que tu me connais pour toi.

« JOSEPHINE.

« Un baiser à chacune de mes petites-filles. »


Après avoir séjourné aux Tuileries et à l’Elysée jusqu’au 12 avril, Napoléon, averti à dix heures du soir du passage de l’Inn par les Autrichiens, part cinq heures après (le 13), avec l’Impératrice. Il est à Strasbourg le 15, à quatre heures du matin. Il y laisse Joséphine, qui va être rejointe par Hortense, et il part pour Vienne « avec ses petits conscrits et ses grandes bottes. » Eugène à l’armée d’Italie se trouvait en grande infériorité par rapport à l’archiduc Jean, qui avait plus de 100 000 hommes contre 60 000, et les ordres de l’Empereur lui interdisaient l’offensive. Il dut rester à Sacile et se défendre sur le Tagliamento pour attendre les trois divisions qui devaient le rejoindre : un premier combat ne lui avait pas été favorable. Dans une bataille véritable, il fut vaincu, malgré ses bonnes dispositions et son intrépidité (16 avril 1809). L’Impératrice écrit :


Strasbourg, ce 28 avril (1809).

« Tu sais, mon cher Eugène, combien je partage ton bonheur ou tes peines. Le malheur que tu viens d’éprouver[1]m’a été extrêmement sensible, mais il ne m’a pas abattue. C’est dans les momens pénibles qu’il faut s’armer de courage, et je compte beaucoup sur le tien. Les revers sont l’épreuve des âmes fortes. Un succès peut réparer ces désavantages. J’espère que tu en trouveras bientôt l’occasion et que tu la saisiras sans t’exposer

  1. Défaite de Sacile.