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pleuré plusieurs fois, surtout en passant à Saint-Denis[1]. Les larmes lui ont fait du bien et je crois pouvoir t’assurer que nous la conserverons. Pauvre Horlense ! Quel aimable enfant elle a perdu ! Depuis ce malheureux événement je ne vis plus, je ne fais que souffrir et pleurer. Elle est partie dimanche pour aller aux eaux de Bagnères. Corvisart compte beaucoup sur l’effet du voyage et il n’y a que cette espérance qui ait pu me faire consentir à son départ. Sa santé reviendra, mais son cœur ne se consolera jamais, je le sens par ce que je souffre. Le Roi est bien malheureux aussi. Il avait tout à la fois à pleurer son fils et à craindre pour sa femme. Imagine-toi qu’elle a été pendant six heures paralysée. J’ai reçu de l’Empereur des lettres du 14 et du 16 de ce mois. Cette perte l’a vivement affecté. Que serait-ce s’il avait pu connaître ce pauvre enfant aussi bien que moi qui, pendant trois mois, l’avais vu tous les jours à Mayence ? Dis à Auguste que je suis touchée de la part qu’elle prend à notre douleur. Embrasse-la pour moi et redouble de soins pour ma petite-fille. Marcscalchi m’a montré ce que tu lui as écrit ; j’en ai été vivement touchée. J’y ai reconnu tous tes sentimens pour moi, mon cher fils, mais sois assuré que j’y mettrai autant de discrétion que tu y mets de grâce et d’empressement. Adieu, mon cher Eugène, je t’aime et t’embrasse tendrement.

« JOSEPHINE. »


De Laeken, Louis a regagné le Palais du Bois, puis le Loo. Il y reçoit, le 29, de l’Empereur l’autorisation de s’absenter de son royaume et de prendre les eaux des Pyrénées. Il part avec son fils, Napoléon-Louis, le 1er juin. Il arrive le 3 à Pont-Sainte-Maxence d’où il écrit à l’Impératrice[2] :


« Madame, nous arrivons ce soir à Saint-Leu ; demain, le petit Napoléon ira vous voir, tandis que j’arrangerai quelques affaires à Saint-Leu. Le soir, je prendrai congé de Votre Majesté et je partirai le lendemain de Saint-Cloud pour [suivre ? ] ma route. Je prie Votre Majesté d’approuver ce projet. En restant confié aux tendres soins de la bonne maman, mon fils ne me

  1. Où le corps de Napoléon-Charles devait être transporté de Notre-Dame où il devait être déposé d’abord.
  2. Coll. part.