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Malmaison, ce 26 mars (1807).

« Tu es bien aimable, mon cher Eugène, de m’avoir envoyé des cheveux de ta fille. C’est un présent charmant et que je ne me lasse pas de regarder. Ils ont déjà la couleur de ceux de sa mère. C’est un présage qu’elle sera jolie et belle comme elle. J’ai retardé un peu le départ de M. Bentivoglio pour avoir le temps de faire achever mon portrait que je voudrais lui donner sur une boîte ; mais je compte qu’il pourra bientôt retourner auprès de toi. Embrasse ma chère Auguste et continue à me donner de ses nouvelles. J’ai reçu deux lettres de l’Empereur du 13 et du 14. Sa santé et ses affaires vont très bien. Adieu, mon cher fils, donne à ta fille un baiser pour moi. Quelle que soit ta tendresse pour elle, tu ne pourras pas l’embrasser plus tendrement que je t’embrasse.

« JOSEPHINE. »


Paris, ce 2 avril (1807).

« Tu ne pouvais me faire un plus grand plaisir, mon cher Eugène, que de me donner souvent des nouvelles de ta femme. J’avais raison de te dire que tout irait bien. Sa santé est aussi bonne que je l’avais espéré et la charmante lettre qu’elle vient de m’écrire m’en donne une preuve bien agréable, mais recommande-lui de se bien couvrir et de ne pas s’exposer trop tôt au grand air. M. Bentivoglio que j’avais retenu jusqu’à ce moment part demain matin : j’ai eu beaucoup de plaisir à le voir. Je le charge d’un joli cadeau que je fais à Auguste pour m’avoir donné une belle petite-fille. Je reçois souvent des lettres de l’Empereur : la dernière est du 20. Il continue à être content de sa santé et de ses affaires. Le jour de Sainte-Joséphine a été célébré à Malmaison par les princesses Pauline et Caroline qui ont Joué chacune un rôle dans deux pièces très flatteuses pour moi. Elles avaient fait faire les pièces pour ma fête. Adieu, mon cher Eugène, je suis bien triste de me trouver seule et séparée de tous les objets de mes affections. Aussi ai-je bien souvent des accès de mélancolie dont je ne puis me défendre. Adieu encore, mon cher Eugène, tu connais toute ma tendresse pour toi.

« JOSEPHINE.

« Embrasse pour moi ta fille. »