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cérémonies, s’évertue à flatter un goût de pompe niaise qui.se développe de plus en plus chez Napoléon.

Le 16, le vice-roi part avec sa jeune femme pour Vérone ; le 17, l’Empereur et l’Impératrice prennent la route de Paris, où ils arrivent dans la nuit du 20 au 27. C’est seulement quinze jours plus tard que Joséphine écrit à son fils.


Paris, ce 13 février.

« J’attends avec bien de l’impatience de tes nouvelles, mon cher Eugène ; il n’y avait qu’une lettre de toi et la certitude que tu étais arrivé à Vérone en bonne santé qui pût diminuer un peu le regret que j’ai eu de me séparer de toi à Munich. Après des momens de réunion si courts, au moins le peu de jours que nous y avons passés ensemble ont-ils été marqués par une époque qui, je l’espère, influera sur ta vie. J’ai appris avec peine, à mon arrivée ici, qu’on avait été beaucoup plus loin qu’il ne convenait pour les dépenses relatives à ta maison. Elles montent à quinze cent mille livres, sans qu’elle soit encore finie. Lorsque l’Empereur l’a su, il était très mécontent, a montré de l’humeur. Tu dois croire que je n’ai rien négligé pour diminuer l’impression que cela faisait sur lui, et je suis bien certaine de n’avoir dit que la vérité en l’assurant que cela était très éloigné de tes intentions ; qu’étant absent depuis deux ans, tu n’avais pu veiller toi-même à cet objet et que tu avais été obligé de t’en rapporter à ceux que tu en avais chargés ; mais que tu serais certainement très mécontent en apprenant qu’on avait outrepassé tes ordres. Je ne t’ai pas écrit plus tôt, mon cher fils, attendu que, depuis mon retour, j’ai mené la vie la plus fatigante possible : jamais un moment à moi, me couchant fort tard et me levant de bonne heure. L’Empereur, qui est très fort, supporte très bien cette vie active ; mais ma santé à moi en souffre un peu. Ta sœur m’a fait bien de la peine à mon arrivée. Elle était d’une maigreur qui, toutes les fois que je la regardais, m’arrachait des larmes. Elle m’a dit que c’était le chagrin qu’elle avait éprouvé de n’avoir pu assister à ton mariage qui l’avait mise dans cet état ; maintenant elle se porte beaucoup mieux.

« Je ne veux pas finir ma lettre sans t’apprendre une nouvelle qui te fera sans doute plaisir, mais tu dois encore l’ignorer jusqu’à ce que l’Empereur l’on fasse part : c’est le mariage de