Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 36.djvu/253

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

retranchemens ? — Nos soldats sont passés la nuit, répond la jeune fille ; je n’ai donc pu juger de leur état. Quant à dire où ils sont allés se retrancher, je ne puis, n’étant pas sortie de la maison. — Ya, ya, reprend l’officier moqueur. Demoiselles françaises, malignes, malignes. »

Des soldats sont montés dans le clocher de l’église. On les voit en observation à la lucarne. Ils ont installé une mitrailleuse. Les aiguilles de l’horloge marquent à présent l’heure allemande.

Les Allemands ne cantonnent pas au village. Ils restent au dehors. Durant cette journée, le canon tonne du côté de Lunéville. Mais, ici, tout est calme.


Tout ne se passait pas partout dans ces conditions relativement tranquilles. A quelques kilomètres, Maixe est en feu. Les forces allemandes se rassemblent de toutes les directions pour donner le coup de collier nécessaire et en finir avec la résistance française. L’armée du prince royal de Bavière venant de Delme, de Morhange et s’étendant jusqu’à Avricourt, a pour objectif le Grand-Couronné et Lunéville. L’armée du général von Heeringen, débouchant du Donon et des cols des Vosges, a pour objectif, au Sud, la ligne de la Mortagne et la forêt de Charmes où elle compte prendre à revers les forces françaises qui ont pour mission de défendre la trouée face au Nord-Est.

Ainsi l’ennemi vise, comme première base, l’occupation en force de la région de Lunéville par le XXIe corps, les IIe et IIIe corps bavarois.

L’attaque allemande commence le 22 août, dès 8 h. 30 du matin, sur les points où le 16e corps s’était établi, les hauteurs de Crion et de Sionviller. Le 15e corps ne se sentant pas de force à lutter avec, dans le dos, la rivière de la Meurthe, est autorisé, vers 10 heures, à se replier sur la rive gauche. On a pris la précaution de ne pas encombrer, par sa retraite, les passages de Lunéville : la 29e division a ordre de prendre les ponts de Blainville-Damelevières ; la 30e division le pont de Rosières-aux-Salines. Le corps vient occuper les positions qui lui ont été prescrites sur les hauteurs de Saffais.

Cependant, il faut tenir le plus longtemps possible sur la rive droite de la Meurthe. Le général de Castelnau donne l’ordre au général Foch, qui commande le 20e corps, de prendre les mesures nécessaires à cet effet. Celui-ci charge la 11e division, « la division de fer, » et spécialement la 22e brigade, de cette mission. La division est sous le commandement du général Ferry. La 22e brigade, venant de Morhange, où elle s’est battue