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d’Emmanuel de Rougé, spécialiste éminent, qui professa au Collège, de 1860 à 1872. Quand sa mort rendit vacante la chaire qu’il avait si brillamment occupée, on pouvait être embarrassé pour lui trouver un digne successeur. Le choix de l’assemblée des professeurs se porta sur le jeune répétiteur de l’Ecole des Hautes-Etudes, qui, depuis près de cinq ans, attestait, par ses leçons et par ses travaux, les progrès constans de son savoir. Il fut proposé en première ligne, à l’âge de vingt-six ans. Un peu effrayé d’un accès si rapide aux honneurs, le ministre réfléchit longuement, puis fit de lui un chargé de cours ; ce fut seulement le 4 février 1874, que son successeur le nomma titulaire.

Maspero a donc été professeur de philologie et d’archéologie égyptiennes au Collège de France pendant près de quarante-deux ans, de 1874 à 1916. Ce long enseignement fut, il est vrai, interrompu à deux reprises par ses séjours en Égypte, dont l’un dura près de six ans et l’autre quatorze ; soit, en tout, une absence d’une vingtaine d’années. Il reste qu’il a professé en personne au Collège pendant environ vingt-deux ans et, simultanément, à l’Ecole des Hautes-Etudes pendant une durée presque égale.

Ce n’est pas ici le lieu de s’étendre sur ce côté, par trop spécial, de son activité scientifique. Disons simplement que, grâce à sa double fonction de professeur et à son esprit d’organisation, il fut à même de donner un enseignement d’égyptologie plus complet et plus coordonné que cela n’avait été possible auparavant. Ses cours ont roulé sur l’archéologie, l’histoire, la grammaire, l’explication des textes, la religion. Il y manifestait au plus haut degré cette variété d’aptitudes et de connaissances qui l’a toujours servi merveilleusement. Visant avant tout aux résultats utiles, il n’a jamais cherché à grossir son public en lui présentant des exposés brillans, mais plus ou moins superficiels. Il s’adressait à un petit nombre d’auditeurs, qu’il se proposait d’instruire véritablement. Plusieurs de ses élèves sont devenus à leur tour des maîtres.

A l’Ecole des Hautes-Etudes était réservé l’enseignement d’initiation, comprenant les élémens de la langue et les exercices de traduction faits par les élèves eux-mêmes sous sa direction. Dans ses leçons du Collège de France, il exposait en général soit les résultats de ses études personnelles, soit ceux des plus récentes découvertes, discutant les questions douteuses,