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lourdes draperies des statues, tandis que l’art allemand s’y abandonnait avec je ne sais quel pédantisme et quelle application violente… Ce serait une nouvelle enquête que nous ne saurions aborder dans cet article, mais dont les conclusions ne seraient pas inutiles, si elles devaient nous amener à mieux comprendre comment, à travers tous les changemens des modes, des circonstances, des théories régnantes et des influences contradictoires, un irréductible « esprit » se laisse toujours reconnaître présent et efficace dans toute « œuvre de France. » Depuis les maîtres de nos cathédrales jusqu’à Nicolas Poussin (qui voulait qu’on mit « de la raison partout ») et à Corot, il existe, on pourrait dégager, une tradition « française. » En nous rendant ainsi de plus en plus capables de comprendre et d’aimer d’un bout à l’autre de son histoire toute la raison et toute la beauté de notre art, on pourrait du même coup, peut-être, introduire un peu de clarté, d’ordre et de précision dans la conscience des artistes d’aujourd’hui, troublés par tant de « systèmes, » hésitans entre des traditions trop souvent mal connues et mal défendues et des nouveautés plus apparentes que réelles, soucieux d’une « originalité » dont ils ignorent la véritable source et résolus pourtant à se consacrer, après la guerre, au travail sacré d’où devra sortir une France de plus en plus digne, par son art, par ses œuvres, par sa « vertu, » de l’héroïsme de ses soldats et de la gloire de son passé.


ANDRE MICHEL.