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fait l’historique de cette propagande française, et a noblement rendu hommage à l’effort des professeurs de l’Université. Qu’il soit permis en retour de se souvenir que la jeunesse de l’éminent prélat appartint à cette Université et lui fit honneur, et de tirer pour elle quelque orgueil de l’admirable propagande à laquelle son nom est attaché. En visant l’étranger, beaucoup de brochures ont d’abord atteint les Français et, les confirmant dans l’instinctif sentiment de leur bon droit, leur ont apporté du réconfort. Cependant il vint à des universitaires encore, sous l’infatigable inspiration de M. Lavisse, l’idée d’une autre tâche : elle consistait à n’avoir en vue que les Français et à ne s’adresser qu’à eux seuls, mais à eux tous. De là les Lettres à tous les Français, leçons d’optimisme raisonné, qui furent répandues par dizaines de mille, et que nos instituteurs tirent pénétrer dans les plus humbles hameaux. Ainsi tous ont combattu dans l’Université. à l’arrière comme au front. Il n’y a pas de non-combattans, en effet, dans cette guerre. Celui qui se sent quelque forme d’énergie que ce soit, se demande : Que puis-je faire pour mon pays ? et le fait. Les professeurs dont nous avons parlé, ne pouvant plus tenir l’épée, se sont mobilisés eux-mêmes pour d’autres batailles. La science, l’autorité, le talent, étaient des armes. Ils s’en sont servis.


L’EXAMEN DE CONSCIENCE DE L’UNIVERSITE

Engagée ainsi dans la lutte, l’Université fut amenée à faire un retour sur elle-même, à sonder ses responsabilités et à mesurer l’efficacité de son action. Toute grande épreuve invite à de semblables examens de conscience. Cet examen est plus nécessaire pour ceux qui enseignent, et qui sont comptables pour les autres en même temps que pour eux-mêmes. L’Université prête donc l’oreille, comme le pays entier, aux leçons de la guerre. Mais alors que, après 1870, tous les ordres d’enseignement furent ébranlés par le contre-coup des événemens et durent subir des remaniemens profonds, il semble que les responsabilités lui soient moins lourdes à porter aujourd’hui et qu’une crise pédagogique ne doive pas, cette fois, sortir de la crise politique que nous traversons. L’Université ne prétend pas avoir sciemment façonné cette âme que le pays s’est découverte et que des ressorts mystérieux ont fait jouer. Elle eut la